mardi 7 juillet 2009

Lire Lolita à Téhéran

Azar Nafisi, domaine étranger 10/18, récit, 467 pages
J'ai lu ce livre peu avant que ne soit reporté au pouvoir le fondamentaliste Mahmoud Ahmadinejad le 12 juin dernier. À la lumière de ce qui s'est produit et perdure depuis ces élections controversées, on peut aisément se figurer la déception de l'auteure et ses étudiantes.
Le récit d'Azar Nafisi, qui a dû abandonner son poste de professeure en littérature étrangère à l'université de Téhéran lors de la révolution islamique, se veut une chronique du quotidien des Iraniennes déchirées entre l'espoir de jours meilleurs et le désir de fuir. Avant de s'envoler pour les États-Unis, Mme Nafisi passera deux ans à initier sept de ses étudiantes aux grands classiques américains, russes et anglais. À travers Nabokov, James et Austen, on survole la littérature tout en suivant l'évolution de ces jeunes femmes qui, invisibles et démunies sous leur tchador, auraient pourtant bien des choses à raconter.
Voici l'essence du message que livre Azar Nafisi aux Occidentaux que nous sommes, peinant à faire la part des choses entre radicaux, intégristes et une importante partie de la population, privée de ses moyens: «Mais pour reprendre les mots d'Humbert Humbert, le poète et criminel héros de Lolita, j'ai besoin que toi, lecteur, tu nous imagines, car autrement nous n'existerons pas. Contre la tyrannie du temps et de la politique, imagine-nous comme nous-mêmes nous n'osions pas le faire: dans nos instants les plus intimes, les plus secrets, dans les circonstances de la vie les plus extraordinairement ordinaires, en train d'écouter de la musique, de tomber amoureuses, de descendre une rue ombragée, ou de lire Lolita à Téhéran sous la révolution. Et imagine-nous ensuite quand tout cela nous fut enlevé, interdit, arraché.»
Lire Lolita à Téhéran a remporté le prix du Meilleur livre étranger 2004 et le Prix des lectrices de Elle, catégorie Document, en 2005.

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