mardi 22 décembre 2009

J'ATTENDAIS QUE TU OSES UN GESTE

Claude Vallières, nouvelles, Éditions Vents d'Ouest, 146 pages

Une chose me fascine encore et toujours en littérature: quand on pense que tout a déjà été écrit et qu'à peu de choses près le destin de M. Untel vaut bien celui de Mme Unetelle, quelqu'un quelque part réussit à vous arracher une larme ou un frisson, une fois de plus.

Un préposé aux bénéficiaires vient tout juste de comprendre la motivation d'une vieille dame arpentant chaque jour à une heure précise les couloirs d'un centre hospitalier en scandant le même thème, confus, que nul autre n'a encore réussi à décoder. Résultat de cette prise de conscience: «Je me suis approché vers elle et j'ai glissé mon bras sous le sien en le tenant fermement. J'ai chanté tout fort dans l'allée qui mène au poste de garde: Pomm-pom-po-pomm, pomm-pom-po-pomm! Elle redressa le dos, bomba le torse et retrouva un semblant de dignité égarée il y a longtemps dans les méandres de sa maladie. Depuis, tous les après-midi vers quinze heures, nous nous remarions madame Roberge et moi; elle avec son homme, moi avec mon métier. Nous chantons et grognons à tue-tête dans le corridor comme deux jeunes amoureux. Et je vous jure, je vous jure qu'à chaque fois, j'ai un peu l'impression d'être comme un livre de Jacques Poulin.»

Qu'est-ce que je vous disais? Vous l'avez bien ressenti le frisson, non? Les autres thèmes abordés dans ce deuxième recueil sont la rupture, l'art, la nature, les vieilles blessures dont il nous faut guérir, l'amour filial... À ce chapitre, j'ai trouvé particulièrement savoureuse l'idée du pot de peines. Vous connaissez? Il s'agit d'un truc transmis de génération en génération afin d'apaiser les angoisses de l'enfance.

Claude Vallières, auteur-compositeur-interprète et chanteur au sein du groupe La Bande Magnétik, nous livre ici douze tranches de vie écrites d'une plume sensible et élégante qu'on avait déjà appréciée dans «Les jours où je suis né», publié en 2005.

mardi 15 décembre 2009

Place au jazz

Le Festival International de Jazz de Montréal fête son 30e anniversaire et Les Arts de la scène de Montmagny se sont mis de la partie en invitant Coral Egan et John Pizzarelli à présenter ici même l'avant-dernière d'une tournée concoctée pour l'occasion.

Initiée toute jeune à la musique grâce à sa mère Karen Young, Coral Egan fait ses débuts au Festival de jazz à l'âge de 11 ans. On ne s'étonne plus dès lors qu'elle soit sur scène dans son élément. Pieds nus, décontractée, elle passe de la guitare au piano afin d'enchaîner les Time to clean up, Whenever, Down to the river et Breath d'une voix envoûtante qui ne craint aucunement la gymnastique vocale. Entre les pièces elle fait de l'humour et se révèle fort sympathique. Coral Egan était accompagnée samedi soir d'une claviériste enrhumée et d'un guitariste plutôt discret. On se demande bien ce qu'ils réussissent à accomplir au meilleur de leur forme, car l'harmonie vocale du trio méritait déjà une note plus qu'appréciable.

Après l'entracte apparaît un John Pizzarelli très classe, semblant sortir d'une autre époque - le New York des Frank Sinatra et Irving Berlin personnifié. Lui aussi nous fait rire, avouant candidement que ce qu'il a retenu de ses cours de français - à savoir «Où est Sylvie?» - ne s'est pas avéré d'une grande utilité pour sa carrière. Il fait quand même l'effort de s'adresser au public dans sa langue et on apprécie. Le John Pizzarelli Quartet comprend un percussionniste, un pianiste virtuose à qui il laisse beaucoup de place et son propre frère Martin, à la contrebasse.

Ils rendent hommage entre autres à Nat King Cole et Sinatra, dont on fête ce jour-là l'anniversaire de naissance. Les musiciens font beaucoup d'improvisation bien sûr, c'est propre au genre, mais une question demeure: qu'est-il donc advenu du Body & Soul qu'on nous avait annoncé, exceptionnellement? S'il s'agissait de la chanson de Joe Jackson on était déjà tout oreilles, mais elle est passée tellement vite qu'on ne l'a jamais entendue. En lieu et place on s'est retrouvé avec Here comes the sun et Can't buy me love, ce qui n'était tout de même pas à dédaigner.

Longuement applaudi, celui qui a reçu le prix Ella-Fitzgerald 2009 au Festival de jazz de Montréal clôturait la soirée en solo au deuxième rappel avec Merry Christmas.

mardi 8 décembre 2009

Toute une réussite

Ce titre est valable à plusieurs points de vue. Primo, le concert qu'on nous a présenté samedi soir à l'église Saint-Mathieu valait bien le déplacement. Secundo, les gens qui au cours des quarante dernières années ont gravité autour du Centre communautaire Normandie en ont fait un espace à caractère social nécessaire et convivial. Tertio, Mme Nathalie Samson et ses camarades contribuent à redorer le blason d'un quartier de la ville peut-être mal-aimé, assurément méconnu.

Sœur Lucienne St-Cyr et M. Claude Hamelin sont à l'origine d'un centre de services communautaires qui ouvre ses portes le 24 décembre 1969 sur ce que l'on nomme aujourd'hui le chemin St-Léon. Grâce à d'indéfectibles bénévoles et quelques employés qui ont à cœur de poursuivre cette heureuse initiative, le Centre communautaire Normandie fête ce mois-ci ses quarante ans de vie active. Quoi de mieux pour célébrer l'événement qu'un spectacle de variétés amenant chacun des participants à partager une passion commune: la musique.

Une panoplie d'artistes de la région, professionnels et amateurs confondus, ont répondu à l'invitation de Mme Samson. Leur cachet? La gratitude de la directrice qui a fait des pieds et des mains pour arriver à ses fins et l'accueil chaleureux de plus de 400 spectateurs. S'il y eut plusieurs prestations bien senties et rendues avec beaucoup de talent, je crois que le clou de la soirée revient au baryton Dominic Côté qui nous a offert un Minuit Chrétiens digne de ramener un païen à l'église en courant. Cela n'enlève rien aux autres interprètes (qu'on ne nommera pas ici faute d'espace) mais qui tous dans une même direction - ça vous rappelle quelque chose? - ont su marier leurs énergies afin que naisse un peu de magie. Nous ne ferons qu'une exception et ce sera pour souligner la présence de Legato, formé d'une douzaine de musiciens de tous les âges. Ce groupe est parrainé par le Centre communautaire Normandie et dirigé par Mme Samson, alors difficile de passer à côté. En plus ils sont bons.

Félicitations aux instigateurs de l'événement et longue vie à leur institution.

mercredi 2 décembre 2009

PARADIS CLEF EN MAIN

Nelly Arcan, roman, éditions Coups de tête, 216 pages

«La vie vaut toujours la peine d'être vécue, ne serait-ce que pour jurer contre elle. Ne serait-ce que pour être témoin, tête haute, de son insondable absurdité.» Déroutant, vous en conviendrez, de la part d'une femme qui s'est suicidée peu de temps après avoir écrit ces lignes.

Nelly Arcan s'est enlevé la vie le 24 septembre dernier alors qu'on publiait son quatrième roman, «Paradis clef en main». Difficile de faire mieux - ou pire - pour attirer l'attention du lecteur, mais ce n'était pas le but. On perçoit dans cette œuvre de fiction un désir de survivre au moins aussi intense que celui de mourir. J'emploie à dessein le verbe survivre, car il est clair que la madame hébergeait de sérieux démons avec lesquels chaque jour elle devait se battre. Quel dommage, vraiment, car il s'agissait d'une jeune femme intelligente et douée, faisant preuve d'une lucidité implacable. S'il vous vient des envies après la lecture de Paradis clef en main, ce sera de découvrir ses précédents écrits et non de mettre fin à vos jours.

On y raconte l'histoire d'Antoinette Beauchamp, entrée en contact avec un organisme censé aider les désespérés à abréger leurs souffrances, qu'elles soient physiques ou morales. Après avoir franchi toutes les épreuves jugées nécessaires, Toinette est enfin prête à faire le grand saut. Son initiative s'avère toutefois un échec lamentable et plutôt que de se retrouver assise sur un nuage, la voilà paraplégique et confinée à un lit qu'elle ne quittera plus durant deux longues années. Elle emploiera ce temps à déverser quotidiennement son trop-plein d'amertume et de hargne sur sa mère, seul lien entre elle et le monde des vivants. Le cynisme est son armure, la vodka son évasion, mais viendra un temps où notre grabataire devra envisager de nouvelles solutions.

Sombre? Évidemment. Tordu? Par moments. Dur? Cru? Oh que oui. Mais ce que je retiens essentiellement du message de Nelly Arcan est la ligne très nette qu'elle trace entre ceux qui passent à l'acte à la suite d'un événement tragique - qu'on peut associer à un état dépressif circonstanciel - et les autres, sans doute une minorité, marqués dès leur naissance par comment dire... une espèce de défaut de fabrication. C'est du moins ce qu'elle tente d'exprimer en parlant de la mission que s'est donnée M. Paradis: «Il a compris que la vie, dans certains cas, était une maladie à soigner. Cette maladie, c'est l'énergie, la volonté, la foi. Ou plutôt, c'est leur défaut. C'est une absence primordiale de ce qu'il faut pour vivre, pour vouloir vivre, un défaut de force vitale antérieur à l'expérience de la vie, permanent, intolérable. Sans cette énergie, le monde n'a aucun sens.»

Peut-être trouvera-t-on un jour le remède à ce mal-être qui vient faucher nombre de vies bien avant l'heure. Pour Nelly Arcan, il est malheureusement trop tard.

Le prêt est une gracieuseté de Livres en tête.

mardi 24 novembre 2009

LE VOYAGE D’HIVER

Amélie Nothomb, roman, Albin Michel, 133 pages

Mesdames et Messieurs, veuillez attacher vos ceintures. Amélie Nothomb vous convie à un vol plané où l’amour et la démesure se disputent les meilleures places.

Puisque nous voici dans les hauteurs, profitons-en pour saluer le travail d’écrivaines jetant un regard bien à elles – éclairé et essentiel - sur la société contemporaine. Tout là-haut au sommet de ma liste, Amélie Nothomb joue de la plume aux côtés des Monique Proulx, Nancy Huston et Anna Gavalda, pour ne nommer que celles-là. Sans doute leur est-il plus aisé d’exprimer leur point de vue que leurs camarades réalisatrices, elles qui peinent tant à obtenir les fonds nécessaires à la diffusion de leurs oeuvres. Faudrait leur poser la question en compagnie, tiens, de Micheline Lanctôt ou encore Marquise Lepage* mais, pour l’instant, revenons à nos moutons.

Zoïle, Astrolabe et Aliénor (mais où va-t-elle donc pêcher ces noms à coucher dehors!) forment un triangle qui conduira Zoïle, amoureux transi, à détourner un Boeing 747 par pur désespoir. C’est que la dame de ses pensées a très peu de temps à lui consacrer, occupée qu’elle est à prendre soin de la neuneu qui lui tient lieu de colocataire. Cette dernière ne fait qu’empoisonner la vie de notre pirate de l’air amateur qui, prend-il bien soin de le préciser, n’a pourtant rien d’un terroriste. «Ma logique est celle-ci: Astrolabe est de très loin ce que j’ai rencontré de mieux sur cette planète. Elle n’a pas des qualités, elle est la qualité. Et cela ne l’a pas empêchée de me traiter avec une cruauté castratrice. Donc, si même le fleuron de l’humanité ne vaut pas mieux que cela, liquidons l’affaire.»

Écriture raffinée, ironie, humour et une érudition à faire pâlir d’envie n’importe quel rat de bibliothèque font d’Amélie Nothomb ce qu’elle est: celle dont on attend chaque année les quelques pages qui nous mèneront dans son imaginaire - complètement délirant la plupart du temps. D’accord, Le voyage d’hiver n’est pas l’histoire la plus palpitante qu’elle ait jamais écrite, mais les qualités énumérées ci-dessus demeurent.

* «Si nos films ne se font pas, c’est tout un pan du monde qui n’est pas représenté, avec nos thèmes, nos particularités, nos corps, nos sensibilités.» - Marquise Lepage, Gazette des femmes sept.-oct. 2009

Le prêt est une gracieuseté de Livres en tête.

mardi 17 novembre 2009

Bienvenue au royaume des Roms

Présentement en tournée au Québec, huit musiciens époustouflants nous ont offert vendredi soir un voyage en «Tsiganie» qui, sincèrement, valait le détour.

Dans La Corrida, Jean Cocteau disait des Gitans: «Ce peuple mystérieux qui semble cracher des fleurs de feu et trépigner pour les éteindre.» Le mystère et les flammes devaient attirer Dimitri puisque, tout jeune, il s'enfuit de chez lui pour suivre un groupe de Romanichels. Quelque part en Bosnie, Dimitri sauve de la noyade un de leurs enfants et se voit offrir un ours en signe de reconnaissance. Le nomade de cœur sinon de naissance devient alors dompteur et fonde des années plus tard Urs Karpatz. Voilà pour la petite histoire et l'origine du nom de ces Ours des Carpathes. Ce même Dimitri vous livre en français le sens des chants interprétés en romanès, langue des Tsiganes.

Il y est question de saisons, de beauté, d'espérance, de mal-être. Ici j'aime bien cette image du serpent à l'intérieur de soi que l'on extrait par le chant et la danse. Si la langue, les instruments et les sonorités diffèrent, tout folklore explore en soi des thèmes similaires. Mes Aïeux recréent sensiblement la même atmosphère et cette chanson intitulée «J'ai parcouru la terre avec mes semelles usées» ne vous rappelle-t-elle pas quelque chose? Si Urs Karpatz vient autant vous chercher - ce fut le cas - on le doit à l'exotisme, à la virtuosité des musiciens qui chacun son tour prend le devant de la scène, au mariage des voix, superbes, et enfin au charisme que dégagent ces singuliers troubadours. Quant à leur musique, elle se fait tantôt mélancolique, tantôt pleine d'entrain. Outre leurs propres compositions et des pièces d'origine roumaine, bulgare, ukrainienne... ils interprètent des danses hongroises de Johannes Brahms, compositeur qui aurait eu une grande influence sur leur art.

On nous a donné la permission à l'entracte d'aller examiner de plus près cet étrange instrument trônant au milieu de la scène appelé cymballum, ou piano tsigane. Heureuse initiative, car plusieurs étaient fort intrigués.

Dimitri et sa bande font la preuve qu'ils savent apprivoiser autre chose qu'un ursidé. L'enthousiasme soulevé dans la salle était indéniable et l'on n'a pas été avare sur les rappels. Le premier d'entre eux fut, textuellement, «Bonsoir à tous et faites de beaux rêves». Des rêves permettant, par exemple, de poursuivre ce périple d'Europe centrale jusqu'au nord de l'Inde, en passant par les Balkans.

mardi 10 novembre 2009

Le jeu de l'ange

Carlos Ruiz Zafon, roman, Éditions Robert Laffont, 537 pages
J'avais adoré L'Ombre du vent, œuvre brillante et originale ayant remporté le Prix du meilleur livre étranger - roman 2004 et s'étant vendue à dix millions d'exemplaires dans le monde. Je nourrissais donc de grandes espérances (merci Dickens) face à cette nouvelle création de l'écrivain catalan. Eh bien tant pis, ce sera pour une autre fois.

Si Le jeu de l'ange n'est pas un mauvais roman, il n'est décidément pas à la hauteur de L'Ombre du vent. On est pourtant ravi d'y retrouver sensiblement la même atmosphère: la Barcelone du début du 20e siècle, le Cimetière des livres oubliés, l'aura de mystère... On est même très intéressé - à prime abord - par les tribulations de David, une carrière qui s'amorce et quelques perles de l'auteur: «L'homme au journal m'observait d'un air amusé, avec cette lucidité que seuls manifestent par moments certains cerveaux dérangés.» Malheureusement ça se gâte après une centaine de pages - l'intérêt s'émousse, on fait du surplace.

En gros, un jeune écrivain gaspillant son talent au profit d'éditeurs véreux se voit offrir un contrat plus que lucratif par une espèce de Lucifer à cravate sorti d'on ne sait où. Le trouble personnage exige de sa part LE livre qui n'a pas encore été écrit, sorte de nouvelle Bible universelle qui aurait un impact crucial sur tous les humains peuplant cette planète en perdition. «Ce que je veux de vous, c'est que vous trouviez une manière intelligente et séduisante de répondre aux questions que nous nous posons tous, et que vous le fassiez à partir de votre propre lecture de l'âme humaine, en mettant en pratique votre art et votre métier. Je veux que vous apportiez un récit qui réveille l'âme.

- Rien de plus...

- Et rien de moins.»

Bien que méfiant, David acceptera ce contrat qu'il signera de son sang puisque de toute façon il n'a plus rien à perdre, ses jours étant comptés. «Je ne peux pas mourir encore, docteur. Pas tout de suite. J'ai des choses à faire. Après, j'aurai toute la vie pour mourir.»

Voilà donc notre macchabée en sursis s'attelant à une tâche qui s'avérera un véritable guêpier où tomberont comme des mouches tous ceux qui l'entourent. Se transformant au fil des pages en justicier-enquêteur, David lui-même échappera à la mort de justesse à maintes reprises, tel un Road Runner version espagnole.

«Il n'est rien, sur le chemin de la vie, que nous ne sachions déjà avant de nous y être engagés. On n'apprend rien d'important dans l'existence, on ne fait que se souvenir.» Pour avoir semé pareil désastre sur son passage, David Martin aura de toute évidence un ou deux souvenirs qui lui auront fait défaut.

Le prêt est une gracieuseté de Livres en tête.

mardi 3 novembre 2009

Une escale à Kingsey Falls

Nora Atalla, roman, Les Éditions GID, 115 pages

La nouvelle est un genre littéraire que j'apprécie tout particulièrement. Un auteur maîtrisant ses éléments - concision, rythme, sens de la chute - peut en tirer de petites merveilles.

Nora Atalla possède ce talent et l'exploite, pour notre plus grand plaisir, dans Une escale à Kingsey Falls. Son séjour de trois ans dans la région des Bois-Francs lui aura inspiré une suite de courts récits, sorte de chronique des faits et personnages qui auraient marqué ce petit village (du moins dans l'imaginaire de l'auteure).

On voit l'endroit comme un asile où auraient trouvé refuge des immigrants ayant fui l'horreur pour se refaire une santé en terre plus clémente. Si Félix Van der Vooten, Fédor Isanbaumgartner et Fang Ying Kim ont des plaies à panser, ils ne sont pas les seuls. Les gens de la place doivent eux aussi faire face aux grandes et petites misères qui composent leur quotidien. Heureusement que la jeune Emma veille au grain! «Aujourd'hui, Aurélie Boisjoly revêtit ses plus beaux atours pour se rendre à la messe de Pâques. Devant le lutrin, elle s'adressera aux ouailles de Saint-Aimé et leur offrira en témoignage ses lendemains de désolation, ses frayeurs sans nom, son incurable solitude, l'immensité de son désespoir. Aurélie Boisjoly leur parlera aussi d'une petite fille et de sa carte de l'espoir qui la fit renaître de ses cendres; de la main tendue d'Amélie Favreau; de l'auberge qu'elles ont achetée ensemble; d'Ophélia qui grandira entre elles. Oui, Aurélie Boisjoly leur racontera sa résurrection».

Vous aurez vite fait de passer à travers les vingt-deux chapitres au cours desquels les destins d'Amélie, Florence, Emma et tous ces autres personnages attachants se croisent et parfois s'unissent afin d'affronter l'adversité. Aurélie et Jonathan Robert en sont un parfait exemple: «J'ai cinquante-huit ans, j'ai une maladie incurable, et je suis une morte en sursis. (...) J'ai cinquante-cinq ans, je suis un amoureux incurable, et tout le monde meurt un jour ou l'autre.»

Lauréate de l'Apollon d'Or 2008 de Poésie vivante, Nora Atalla remportait en 2007 cinq prix littéraires dont le Premier prix du Libraire (nouvelle) et le Premier prix du Rêve (conte) de Regards.

mardi 27 octobre 2009

Trois siècles en deux heures

On sait déjà que la ville de Montréal portait à l'origine le nom d'Hochelaga, lac des castors en langue iroquoise. Ce qui est peut-être moins connu est le fait que le trio qui porte son nom a su, grâce à son élégance et sa virtuosité, se tailler une réputation enviable sur la scène internationale.

«De Haydn à Martinu, trois siècles de trios». Ainsi s'intitulait le concert présenté dimanche après-midi en formule cabaret à la salle Edwin-Bélanger. Considéré comme l'un des meilleurs ensembles de musique de chambre au pays, le Trio Hochelaga nous conviait à la découverte.

Figuraient au programme: Trio en mi bémol majeur, Hoboken XV :30 de Haydn, Trio en do mineur, opus 66 de Mendelssohn, Deuxième Trio H. 327 de Bohuslav Martinu et enfin le Trio en ré mineur, opus 32 d'Anton Arensky. Personnellement je ne connaissais pas ces œuvres et je ne crois pas errer en affirmant que je n'étais pas seule dans ce cas, mais voilà justement le mandat que s'est donné le trio: se consacrer à la diffusion du répertoire de musique de chambre, en faire découvrir les richesses méconnues à un plus large public.

En novembre 2008, Danielle Ouellet rapportait dans la Scena Musicale cette réflexion d'Anne Robert: «Je sais que cette forme durera toujours parce qu'elle élève l'âme et que nous en avons tous besoin. Les œuvres de musique de chambre permettent aux interprètes d'atteindre des niveaux de jeu exceptionnels». Les membres du Trio Hochelaga n'éprouvent aucune difficulté à en faire la démonstration, particulièrement dans la dernière œuvre, celle d'Arensky où le superbe dialogue entre la violoniste et le violoncelliste, la complicité palpable des musiciens, la douceur qui succède à l'intensité et la fougue réussissent à envoûter même le profane. On nous offre une ouverture sur le monde, profitons-en pour élever notre âme...

mardi 20 octobre 2009

Trêve de bondieuseries

Dans les deux romans qui suivent, publiés aux éditions Carte blanche, Jean Di Tomaso déboulonne nombre de mythes issus du catholicisme. Un saut en arrière de quelques décennies suffit pour mesurer leur impact sur la vie des gens à l'époque.

La messe est finie

Ce texte, parsemé de faits liés à l'histoire religieuse au fil des siècles, débute à Saint-Jean-Port-Joli pour se terminer à Chicoutimi.

On conçoit qu'un prêtre à la veille de défroquer puisse vivre un conflit intérieur d'une grande intensité. On s'attend à un débat de conscience chez cet homme divisé entre l'amour du Divin et celui d'une femme - toute divine soit-elle - mais que de questions, que de questions! Elles déferlent en rafales sur le lecteur qui en perd son latin... et le fil de l'histoire. S'agit-il d'un roman ou d'un réquisitoire? «On nous a répété à tout propos qu'il n'y a qu'une seule et vraie religion. Y a-t-il un salut possible hors du catholicisme? Preuves à l'appui, des scientifiques soutiennent que les humains existent sur terre depuis deux ou trois millions d'années au moins; le christianisme, depuis deux mille ans. Pourquoi Dieu a-t-il attendu tout ce temps? Que fait-on de la majorité de l'humanité qui n'est pas baptisée ou de ceux qui ont eu le malheur de naître avant le maître Jésus?»

Quelqu'un a-t-il une réponse?

Si Dieu le veut

Dans ce roman publié en 2008, nous nous retrouvons à Montréal quelque part au milieu des années soixante. C'est du moins ce que l'auteur laisse entendre.

Abus d'autorité dans la smala, pudibonderies et autres bondieuseries feront en sorte qu'Antonina Castelli et Franco Floriano ne connaîtront jamais un bonheur pourtant prometteur. Ici l'auteur s'offre mille et une incursions dans la tête de protagonistes qui, au lieu de poser des gestes concrets, passent la majeure partie de leur temps à se triturer les méninges. Quel fiasco inutile que leurs vies gâchées; on aurait presque envie d'intervenir en leur disant de profiter de l'existence pendant qu'il en est encore temps.

D'origine italienne, M. Jean Di Tomaso est né à Montréal où il a étudié la rédaction, la littérature française et l'art dramatique avant de travailler à titre de rédacteur en chef de TV Hebdo durant plusieurs années.

mercredi 14 octobre 2009

Impeccable

Au moment même où Guy Laliberté dirigeait du haut de l'espace un spectacle semble-t-il grandiose, près de 4 000 fans planaient eux aussi dans les hautes sphères en accueillant leurs idoles à Montmagny.

Des gens de l'Ontario, de New York et des quatre coins de la Belle Province s'étaient donné rendez-vous à Montmagny vendredi dernier afin d'accueillir comme il se doit de jeunes Québécois connaissant un succès fou à l'échelle planétaire. Une dizaine d'entre eux auraient même couché à la belle étoile la veille dans le but de s'assurer les meilleures places. Parmi ces derniers, une jeune fille a été invitée à monter sur scène afin d'être prise en photo avec les gars de Simple Plan. Si quelques autres fidèles se sont présentés en matinée sous la pluie, le gros des troupes serait arrivé sur les lieux en fin d'après-midi.

En première partie, les membres de The New Cities ont été très chaleureusement accueillis. Grâce à leur «synth-pop» accrocheuse, ils ont su réchauffer la salle avec une prestation d'environ 45 minutes. Le party était pris, Simple Plan n'avait plus qu'à se pointer et cueillir une foule enthousiaste. Ils ne l'ont pas déçue, lui offrant sur un plateau une performance enlevante combinant les succès de leurs trois premiers albums et quelques surprises glissées au passage. De Jump à Crazy en passant par I'm just a kid, Welcome to my life et Perfect venue en rappel, leurs admirateurs en ont eu pour leur argent. On ne pouvait rien manquer, deux écrans géants ayant été disposés de chaque côté de la scène.

Déroulement impeccable

Chapeau aux gens des Arts de la scène et du Festival de l'Oie Blanche. Un événement d'une telle ampleur exigeait une organisation solide et rien n'avait été laissé au hasard. En bout de ligne tout le monde a été ravi et au dire de Jean Marois, président du festival, le seul et unique fait à déplorer serait celui-ci: ceux qui n'étaient pas au rendez-vous ont manqué un sacré bon show...

mardi 6 octobre 2009

Rencontre improbable entre deux univers

Il faut de tout pour faire un monde et la pièce d'Alexis Martin offre un condensé d'éléments disparates dont l'interaction donne lieu à des situations pour le moins loufoques.

Alors que Guylaine (Émilie Bibeau) attend avec anxiété l'arrivée de son amoureux, elle a la désagréable surprise de voir débarquer inopinément son frère Bob. Ce dernier, qui fricote avec la petite pègre, est dans le pétrin jusqu'au cou. Guylaine réussit tant bien que mal à s'en débarrasser avant que ne se pointe son petit ami, brillant universitaire nanti «d'une mémoire» sur la mort de Dieu qui éveillera peu d'échos chez sa compagne, celle-ci mettant toutes ses énergies à surveiller son langage afin de se montrer à la hauteur. Cette situation cocasse prend abruptement fin lorsque le couple découvre un Bob ensanglanté gisant dans la cour.

L'heure est grave, Gilles doit de toute urgence aller porter au grand boss une missive donnant le nom de deux rivaux à abattre. Quelqu'un doit y passer - ces gars-là, ou bien Bob et Matroni - mais notre philosophe porteur de principes à toute épreuve fera bien des manières avant d'apporter son concours à une entreprise qu'il juge immorale.

L'essence de la pièce se retrouve dans le dialogue de sourds auquel se livrent Gilles (François Létourneau) et Matroni (Pierre Lebeau). L'un joue son rôle d'intellectuel naïf à la perfection, l'autre - le Méo des Boys - est expressif à souhait.

On n'est pas à court de surprises, le dernier tableau nous apportant l'arrivée - et la brutale sortie - du père de Gilles. Cet avocat désabusé utilisera d'une main de maître verbe, ironie et gin tonic afin d'amener son fils à sauver sa peau et peut-être regarder la vie d'un autre œil, le sien.

Matroni et moi, créée il y a quinze ans par Alexis Martin, a été adaptée au cinéma en 1999. Bien que les personnages poussent la caricature à l'extrême, on apprécie l'efficacité avec laquelle ils rendent un texte rempli d'humour, de sensibilité et de questions d'ordre philosophique incitant chacun à considérer sa propre conception de la moralité.

mardi 29 septembre 2009

Mégashow en ville

Les gars de Simple Plan et leurs fans s'apprêtent à envahir l'aréna le vendredi 9 octobre. Magnymontois soyez prêts, l'espace de quelques heures la population va grimper et la moyenne d'âge diminuer de façon inversement proportionnelle.
De toute évidence, on a affaire à des pros qui ont gardé les pieds bien ancrés sur terre malgré un succès planétaire. C'est du moins la première conclusion que je tire de mon entrevue avec le guitariste Sébastien Lefebvre.
Ils ont sillonné le globe, ont été chaleureusement accueillis à Tel-Aviv, Moscou, Hong Kong, au Brésil, en Norvège, en Australie... et s'apprêtent à débarquer à Montmagny, promettant à leurs compatriotes un show à la hauteur de leurs attentes. S'ils ont vécu à l'étranger des expériences inoubliables, le fait de se produire chez eux leur permet de parler leur langue maternelle et d'être plus spontanés. Le spectacle du 9 octobre sera pour eux le dernier de l'année, puisqu'ils se consacreront ensuite à l'écriture d'un 4e album.
Quand on leur demande la clé de leur succès, la réponse est toute simple: beaucoup, beaucoup de travail. Bien qu'ils aient vendu quelque sept millions d'albums à travers le monde, ils ne sont pas du genre à s'asseoir sur leurs lauriers. Ces cinq amis de longue date - ils se connaissent depuis l'époque du secondaire - ont développé une solide complicité et poursuivent le même objectif, soit de continuer aussi longtemps que possible à pratiquer un métier qui les passionne.
Fondation Simple Plan
Par le biais de la Fondation créée il y a quatre ans, on a remis 100 000$ en 2008 à 15 organismes dont le but est de venir en aide aux ados et jeunes adultes vivant des situations difficiles: troubles sociaux, maladie, problèmes de drogue... Cette année, on parle de quelque 170 000$ consacrés à la cause.
The New Cities
Un autre groupe qui fait beaucoup parler de lui en ce moment au Québec assurera la première partie du spectacle. The New Cities, originaire de Trois-Rivières, offre dit-on des concerts électrisants reconnus par l'industrie locale.
Après les deux prestations, un DJ se chargera de faire bouger les fans gonflés à bloc qui auront encore de l'énergie à dépenser. Tant qu'à organiser un gros party, ne faisons pas les choses à moitié! Moins de dix jours avant la tenue de l'événement on nous informe que, sur une possibilité de 4 000 billets, il en resterait moins de 1 000 pour ce que l'on peut déjà considérer comme étant le plus gros show jamais produit dans la capitale de l'oie blanche.
Du point de vue du diffuseur
Christian Noël ne le cache pas, il lui aura fallu faire preuve d'audace et d'inconscience (ce sont ses propres termes) afin de mener à bien une telle entreprise. Ce mégashow présenté en exclusivité à Montmagny lui aura demandé plusieurs semaines de travail. Lorsque, il y a quatre ans, l'organisme Les Arts de la scène a pris en charge la programmation musicale du Festival de l'Oie Blanche, son directeur général songeait déjà à y présenter un spectacle d'envergure. Les administrateurs du festival souhaitaient du changement? Eh bien ils ont été servis... et surpris puisque Christian ne leur a soumis le projet qu'une fois passablement avancé dans ses démarches. Qu'à cela ne tienne, le président Jean Marois et son équipe ont accepté l'idée avec ce qu'elle comportait de risque et de difficultés techniques. L'administration municipale a aussi embarqué et c'est tant mieux puisqu'il s'agit, question logistique, d'un gros défi à relever.
Vision à long terme
À 35$ du billet, personne ne s'attend à faire de profits mirobolants. Ce n'est pas le but recherché. Ce que Les Arts de la scène et Le Festival de l'Oie Blanche souhaitent, en fait, est de rendre un spectacle de haut calibre accessible à des jeunes qui garderont un souvenir impérissable de cette soirée et souhaiteront renouveler l'expérience.

mardi 22 septembre 2009

Tout simplement charmant

Après une absence de plusieurs années, Yvon Éthier alias Patrick Norman se dit heureux mais nerveux (on ne le croirait pas) de remonter sur scène à l'occasion d'une tournée amorcée tout récemment.
C'est avec la chanson titre de son album «Comment le dire», paru en 2007, que Patrick Norman débute devant une salle comble un spectacle tout en douceur qui ravira les Magnymontois. Accompagné d'un talentueux complice en la personne de Jean-Guy Grenier (voix, guitare et «pedal steel»), celui que l'on voit évoluer sur la scène musicale québécoise depuis plus de quatre décennies interprète succès et nouvelles pièces - il en a de très belles - pour un public qui évidemment s'empresse de chanter et exprimer son enthousiasme dès les premières notes de ses chansons phares. «Quand on est en amour», «L'hirondelle» et «Elle s'en va» font bien sûr partie de ces dernières. N'allons pas oublier «Mon cœur est à toi», qu'il présente en 1973 à l'émission Jeunesse de Jacques Salvail le jour de la Saint-Valentin (première position au palmarès) et «La guitare de Jérémie», superbe pièce écrite à son intention par Michel Rivard.
Il est aisé de décrire l'appréciation des spectateurs, puisque les mêmes vocables reviennent sans cesse à l'entracte et à la sortie: excellent guitariste sachant tirer de son instrument des harmonies d'une grande beauté - timbre de velours - extrêmement sympathique - drôle - textes d'une sensibilité remarquable. Je suis tout à fait d'accord. Que l'on soit familier ou non avec son répertoire, le verdict demeure le même.
Patrick Norman circule dans les allées, échange quelques poignées de mains, se montre assez délicat et attentionné pour se laisser prendre en photo et, après avoir chanté en rappel «Crois en l'amour», il s'empresse d'aller rejoindre ses fans qui l'attendent à l'entrée de l'auditorium. Charmant vous disais-je, tout simplement charmant.

mardi 15 septembre 2009

On se souvient!

Le dimanche 13 septembre, soit 250 ans jour pour jour après la défaite des nôtres aux mains des Anglais sur les Plaines d'Abraham, la Société d'histoire de Montmagny, de concert avec les membres du Comité consultatif de la culture, présentait deux activités d'envergure visant à commémorer les tristes événements entourant la Conquête et l'incendie de la Côte-du-Sud.
Près de 200 personnes assistaient, à la Salle Le Bûcheron, à un déjeuner-conférence au cours duquel deux historiens émérites ont retracé les grandes lignes de la vie que menaient les Canadiens français avant, pendant et après la conquête.
La colonie en danger
Pas facile, la vie au 18e siècle! Malgré l'épidémie de variole de 1734, les disettes et les hivers rigoureux, la Côte-du-Sud et ses terres fertiles deviennent, sous l'ordre de l'intendant, un grenier pour la colonie. On en veut pour preuve ces faits rapportés par Yves Hébert: «À l'hiver 1743, 5032 minots de farine transportés par traîneaux partent de la région pour Québec. En vidant les paroisses de leurs surplus, l'administration met en péril la survie des plus pauvres».
Une sale guerre
M. Gaston Deschênes prend ensuite la parole afin de relater comment s'est déroulée la conquête sur notre territoire. De Kamouraska à Beaumont, les troupes de Wolfe (Rangers et Highlanders) pillent et incendient les villages. L'un de ses propres lieutenants, dégoûté, aurait qualifié cette entreprise de «la plus sale des guerres». M. Deschênes souligne le fait que Wolfe aurait prié les habitants de ne pas se mêler du conflit opposant Anglais et Français, mais nos valeureux ancêtres étaient bien résolus à se battre pour sauvegarder ce qu'ils avaient acquis à la sueur de leur front.
Pâtira, pâtira pas?
Lors de la période de questions qui suivit la conférence, on a demandé des éclaircissements concernant le Pâtira où femmes, enfants et vieillards auraient trouvé refuge alors que les troupes anglaises incendiaient la Côte-du-Sud. M. Hébert a alors précisé qu'il s'agissait-là d'une tradition orale, malheureusement non archivée mais vérifiable auprès de sources sûres. Si vous désirez en savoir plus sur le sujet, je vous invite à lire le roman historique de M. Joseph-Pierre Barcelo intitulé «Les réfugiés du Pâtira».
L'Homme-Croix
Après la conférence, les gens se sont rendus près du cimetière où l'on a dévoilé un monument dédié à Jean-Baptiste Couillard, Joseph Couillard, René-Louis d'Amours de Courberon et Paul Côté ayant, ironie du sort, survécu à la bataille des Plaines pour tomber le lendemain dans une embuscade mettant fin à leurs jours alors qu'ils rentraient à la maison. L'œuvre de Mme Lucie Garant a été choisie parmi les douze projets présentés puisqu'elle s'est distinguée, comme l'a fait remarquer Mme Henriette Corriveau, par son «interprétation de la thématique et sa force évocatrice».
Assistaient à la conférence et au dévoilement de l'Homme-Croix des descendants de René-Louis d'Amours de Courberon, certains étant venus d'aussi loin que le Wisconsin et le Nouveau-Mexique afin d'honorer la mémoire de leur ancêtre.

mardi 8 septembre 2009

Autosabotage de première!

Alors que je naviguais à travers un ouvrage de Jacques Salomé paru en 2008, «À qui ferais-je de la peine si j'étais moi-même?», j'ai été tentée par un nouveau roman publié aux Éditions GID. À sa lecture, je me suis surprise à revenir plus d'une fois aux judicieux conseils de Salomé. Si seulement Camille avait pu en faire autant...
C'est qu'elle y est allée très fort dans l'autosabotage, l'héroïne de «Quelque chose de lui» de Mme Lise Vekeman que vous ne voudrez laisser avant de connaître le dénouement. Quant au premier volume, sous-titré «Comment renoncer à nos autosaboteurs», il s'agit d'une énième publication (il en a près d'une soixantaine à son actif!) du célèbre psychosociologue français.
Quand le doute s'installe...
Camille Nolin en a gros sur le cœur et la conscience. Un accident dont elle se sent responsable l'a laissée meurtrie à jamais, mentalement et physiquement, alors que les deux autres personnes qui prenaient place à bord du véhicule - son amant et son frère - n'ont pas survécu à l'impact. Afin de ne pas sombrer dans la folie ou la dépression, Camille éprouve un besoin irrépressible de confier à quelqu'un son histoire du début à la fin, dans ses moindres détails. Celui qui recevra ses confidences est Vincent, ami de longue date dont les sentiments à l'égard de la jeune femme sont aussi ambigus que ceux des personnages qui composent ce drame complexe.
Le lien avec Jacques Salomé et sa psychiatrie sociale? La jalousie, la paranoïa, les intentions que l'on prête à l'être aimé sans oser aller au fond des choses, pour ne nommer que quelques-uns de ce qu'il appelle les autosaboteurs. Leur gamme est infinie, il n'y a qu'à piger dans le lot. Le pire d'entre tous? Sans doute l'implacable culpabilité.
QUELQUE CHOSE DE LUI
Lise Vekeman, roman
Éditions GID, 177 pages
À QUI FERAIS-JE DE LA PEINE SI J'ÉTAIS MOI-MÊME?
Comment renoncer à nos autosaboteurs
Jacques Salomé, Éditions de l'homme, 217 pages

mardi 1 septembre 2009

Folklore insulaire

Un 25e anniversaire se doit d'être souligné de belle façon et pour ce faire, la Corporation pour la mise en valeur de Grosse-Isle a fait appel aux membres du Théâtre des Deux Masques et de la Troupe Nouvelle Époque.
Les contes et légendes transmis - le plus souvent oralement - de génération en génération constituent une part non négligeable de notre héritage culturel. Qu'ils soient dépoussiérés à l'occasion, histoire de demeurer dans la mémoire collective, représente une initiative à laquelle on applaudit. Ceux qui ont assisté aux Contes des isles présentés les 28, 29 et 30 août à la salle François-Prévost du Centre des migrations peuvent en témoigner. Mme Catherine Chevrot, fidèle collaboratrice du TDM, signe quatre des six contes en question.
La première à monter sur scène est Claudine Landry - bonjour la relève - qui joue le rôle d'une jeune Irlandaise et relate dans Le chœur de Grosse-Île son douloureux départ du port de Dublin dans l'espoir de jours meilleurs. Intensité et émotion sont au rendez-vous, le ton est donné. Elle est suivie de Marc Fréchette, contant l'histoire du fantôme du Moulin Patton avec le talent qu'on lui connaît déjà. André Gaudreau, qui souvent nous fait rire dans des rôles plus légers, change de registre pour entrer dans la peau d'un médecin officiant à Grosse-Isle, désespéré devant son impuissance à éradiquer le mal emportant les immigrés.
La deuxième partie du spectacle nous ramène Marc Fréchette et la très belle Légende des oies d'Irlande. Une surprise nous attend au tournant: le jeune Dimitri Laflamme livre un texte écrit de sa main, où il est question d'un certain Maurice qui souhaitait seulement qu'on l'écoute même si personne n'arrivait à vraiment le comprendre. On compatit avec ledit Maurice et on applaudit derechef. La cerise sur le sundae? Le Petit bonhomme sans tête de l'Isle-aux-Grues raconté par un Réjean Boulet qui parvient une nouvelle fois à nous émouvoir.
Les membres de la Troupe Nouvelle Époque ne sont pas en reste car ils animent la soirée de «danses endiablées pour appeler les esprits des îles», comme le dit Noël Delisle qui avec Marc Fréchette signe la mise en scène.

mardi 25 août 2009

TARMAC

Nicolas Dickner, roman, éditions Alto, 269 pages
Nouilles ramen et fin du monde - deux éléments très présents dans ce deuxième roman du Louperivois d'origine, jeune homme d'une grande érudition dont l'imagination semble connaître peu de limites.
Août 1989, stade municipal de Rivière-du-Loup. Michel Bauermann est sur le point de rencontrer Hope Randall, détentrice d'atouts plus ou moins enviables: 195 points de Q.I., la connaissance de sa propre date d'apocalypse, une mère disjonctée et une vieille Lada qui, partie de Yarmouth, a choisi de rendre l'âme dans le bas du fleuve.
Voilà donc le point de départ d'une histoire d'amour pour le moins compliquée qui vous mènera à New York et dans les rues de Tokyo où Hope circule avec son Rough Planet, outil absolument indispensable pour demander «Puis-je emprunter votre masque à gaz / votre habit antiradiation?» (Gasumasuku / houshanou bougyo suutsu o kari te mo ii desu ka?).
Pour le reste, disons qu'il s'agit d'un heureux mélange d'humour, de faits hautement scientifiques, d'actualité politique internationale de l'époque et de divagations qui ne manquent pas de profondeur: «Pendant une seconde, Hope imagina ses rognures d'ongles envoyées sur une planète vierge et sans vie, comme la Terre à l'époque de la grande soupe primitive. Elles pourraient contaminer ce milieu nourricier, y engendrer de nouvelles formes de vie. On verrait apparaître des unicellulaires, des méduses, puis des poissons vertébrés qui grouilleraient et nageraient et ramperaient, sortiraient des océans, développeraient des technologies et des langages, des religions, des villes et enfin des civilisations qui se feraient la guerre et bâtiraient des tours en spirale et craindraient la fin des temps. Tout un monde né de quelques rognures crasseuses.»
Du même auteur, Nikolski paru en 2005 a reçu le Prix des libraires du Québec, le Prix littéraire des collégiens et le prix Anne-Hébert, sans compter qu'il a déjà été traduit en dix langues. Impressionnant vous dites?
(Le prêt est une gracieuseté de Livres en tête)

mardi 18 août 2009

JULIUS WINSOME

Gerard Donovan, roman, Seuil, 245 pages
Troublant, choquant, empreint de poésie. Voilà un livre qui ne vous laissera pas indifférent.
Un chalet dans le bois. Une passion pour les mots - 3 282 livres laissés par le paternel en tapissent les murs. Un fidèle compagnon à quatre pattes qui se fait abattre sauvagement par un chasseur. Oh, oh, ça va faire mal.
Poursuivons. Un homme. Seul. Doux, bienveillant, prenant grand soin des plantes, des fleurs, des animaux. Un homme bon qui va se transformer en monstre implacable, au cœur aussi glacial que la forêt du Maine sous la tourmente.
Si la vengeance constitue évidemment le nœud de l’histoire, Julius Winsome ratisse beaucoup plus large. On y parle de nature, de littérature, des horreurs de la guerre, de la redoutable efficacité du Lee-Enfield ramené des tranchées par le grand-père. Tout ça dans un style direct, un brin sarcastique: «Vrai, je l’avais traité comme un bébé, et d’aucuns trouvent ça anormal de traiter un animal comme un être humain, alors que tant de malheureux crèvent de faim. Commençons par nourrir ceux qui n’ont rien à se mettre sous la dent! Sans doute ces gens-là nourrissent-ils ces affamés dès qu’ils en ont l’occasion, je n’en ai aucune idée.»
Beaucoup d’originalité, enfin, de la part de celui qui au fil des pages dévoile son âme de poète, usant d’un vocabulaire shakespearien digne de ce nom même après traduction:
«De ton insidiateur j’ai tiré l’incarnate peinture.
Devant son air perplexe j’ai traduit l’anglais en anglais:
J’ai répandu le sang de ton espion.»
Poète, romancier et nouvelliste originaire d’Irlande, Gerard Donovan fera paraître prochainement un recueil de nouvelles: Country of the Grand. On a déjà hâte.
(Le prêt est une gracieuseté de Livres en tête)

mardi 11 août 2009

MORLANTE

Stéphane Dompierre, roman d'aventures, éditions Coups de tête, 154 pages
Décidément, les pirates sont à l'honneur par les temps qui courent. Après M. Camille Bouchard, voici que Stéphane Dompierre se jette à l'eau en pleine mer des Caraïbes infestée de requins et de corsaires.
Amateurs de violence et de clichés, vous serez comblés. On n'a qu'à penser ici au surhomme sans foi ni loi pouvant se battre seul contre une armée, mais tremblant comme un premier communiant devant une pitoune bien roulée. Ne nous limitons cependant pas à ce seul énoncé réducteur. Ainsi ai-je bien aimé certaines réflexions de l'auteur, à commencer par celle-ci: «... mes conversations perdaient toute cohérence, les discussions n'avaient plus d'intérêt pour moi; pourquoi perdre mon temps à raconter quoi que ce soit, avec des mots approximatifs, alors que je pouvais m'exprimer plus clairement par écrit, en prenant mon temps, en choisissant le bon ton, en n'étant interrompu par personne?».
Ensuite j'apprécie l'humour noir et l'ironie: «Morlante pose sa tasse, sort son calepin, trempe sa plume dans une gorge de pirate fraîchement tranchée où éclatent encore quelques petites bulles, et inscrit, sur une page blanche, pour être certain de ne pas l'oublier: «Le crime ne paie pas.» Voilà la beauté, mais aussi le grand drame de l'écrivain: même avec des machettes aux poings, même en admirant des navires en flamme, même en dégustant un thé vert à petites gorgées, il est toujours au travail.» Pas mal dans le genre, non?
Âmes prudes, s'abstenir.
(Le prêt est une gracieuseté de Livres en tête)

mardi 4 août 2009

L'homme qui ne voulait pas vieillir

Robert Genest, roman, Les éditions GID, 188 pages
Liberté, choix - ces mots ont tellement été galvaudés, notamment par les amateurs de radio-poubelle, qu'on hésite maintenant à les employer. Dans l'histoire qui suit, cependant, les deux termes retrouvent bel et bien leur sens premier.
Archibald Bonenfant est le genre d'homme qui sait ce qu'il veut. Ou plutôt, il sait ce qu'il ne veut pas: laisser la maladie prendre le dessus et le mener pas à pas vers la déchéance, la dépendance et enfin la mort. Voilà pourquoi il prendra les choses bien en mains avant que celles-ci ne le trahissent tout à fait. Le plus délicat sera de convaincre ses proches de la nécessité absolue de sa démarche.
Hobby mettra un an complet à préparer son 50e anniversaire, moment où il fera le bilan de sa vie et offrira un dernier témoignage d'amitié aux sept personnes encore de ce monde qui auront indubitablement marqué son existence. Comme son scénario est réglé au quart de tour, il saura trouver les mots justes pour les amener lentement mais sûrement à accepter son choix: «Le Parkinson veut que ma vie soit une plaie ouverte qui s'infecte davantage de jour en jour, à la vue de gens qui aimeraient mieux regarder ailleurs. Je constate simplement que moi qui ai voulu contrôler toute ma vie dans ses détails les plus essentiels (je crois y être parvenu) et bien je ne suis même plus capable de contrôler mes gestes les plus élémentaires. Je ne suis pas amer, je suis triste de voir que mon essence s'évapore, se désagrège lentement.»
J'ai trouvé ce récit extrêmement intéressant; il y a là matière à réflexion pouvant donner lieu à de franches discussions sur le suicide, l'euthanasie, l'ultime pouvoir de maîtriser sa destinée pendant qu'il en est encore temps.
Attention toutefois - cette œuvre fictive ne se veut nullement l'apologie d'une solution parfois facile, parfois insensée. Il s'agit évidemment d'une question purement personnelle.
Il n'y a ici qu'un seul fait à déplorer: les nombreuses fautes de français venant vous distraire d'une lecture autrement captivante.

mardi 14 juillet 2009

Pirates 3 - L'emprise des cannibales

Camille Bouchard, roman aventure, éditions Hurtubise, 285 pages
Hardi, moussaillons! S'il n'y a rien pour vous faire peur: ni cannibales, ni sang ni mots trop savants, lancez-vous tête première dans ce récit décoiffant et tâchez d'en ressortir sans œil de verre ni moignon.
Ceux qui ont lu les deux premiers tomes de Pirates (L'Île de la Licorne et La Fureur de Juracan), attendaient sans doute avec impatience la réplique de Cape-Rouge, redoutable personnage hantant les mers du Sud à la recherche d'ennemis à abattre. Les autres découvriront un épisode enlevant - inspiré d'une époque cruelle et bien réelle - qu'il est toutefois préférable de rattacher à son contexte, ne serait-ce que pour les termes n'ayant pas été répétés au glossaire du 3e volume. Cet outil s'avère pour le moins pratique, l'auteur maniant avec un évident bonheur mots dérivés de dialectes indigènes de l'époque (XVIe siècle), expressions venues du vieux français et termes maritimes: «En fait, expliqua Cape-Rouge, (...) le talon du mât de perroquet est posé à l'arrière du ton de hune, assis dans une emplanture entièrement reconstruite, le chouquet inversé.» Plaît-il?
Le ton est donné d'entrée de jeu, alors que le jeune Lionel Sanbourg prend la plume pour écrire dans un français châtié: «Ainsi donc, voici, de ma prose malhabile et de ma main pataude, le récit de notre communauté embarquée dans une entreprise de revanche à bord du galion nommé - à plus d'un titre juste - Ouragan. Vous suivrez, retracés d'encre noire, les sillons rouges que balafre notre navire sur le visage de la mer.» Qu'en termes élégants ces choses-là sont dites.
L'auteur a reçu notamment le Prix littéraire du Gouverneur général pour la littérature jeunesse avec Le Ricanement des hyènes et le Prix Alvine-Belisle 2005 pour L'Intouchable aux yeux verts.

mardi 7 juillet 2009

Lire Lolita à Téhéran

Azar Nafisi, domaine étranger 10/18, récit, 467 pages
J'ai lu ce livre peu avant que ne soit reporté au pouvoir le fondamentaliste Mahmoud Ahmadinejad le 12 juin dernier. À la lumière de ce qui s'est produit et perdure depuis ces élections controversées, on peut aisément se figurer la déception de l'auteure et ses étudiantes.
Le récit d'Azar Nafisi, qui a dû abandonner son poste de professeure en littérature étrangère à l'université de Téhéran lors de la révolution islamique, se veut une chronique du quotidien des Iraniennes déchirées entre l'espoir de jours meilleurs et le désir de fuir. Avant de s'envoler pour les États-Unis, Mme Nafisi passera deux ans à initier sept de ses étudiantes aux grands classiques américains, russes et anglais. À travers Nabokov, James et Austen, on survole la littérature tout en suivant l'évolution de ces jeunes femmes qui, invisibles et démunies sous leur tchador, auraient pourtant bien des choses à raconter.
Voici l'essence du message que livre Azar Nafisi aux Occidentaux que nous sommes, peinant à faire la part des choses entre radicaux, intégristes et une importante partie de la population, privée de ses moyens: «Mais pour reprendre les mots d'Humbert Humbert, le poète et criminel héros de Lolita, j'ai besoin que toi, lecteur, tu nous imagines, car autrement nous n'existerons pas. Contre la tyrannie du temps et de la politique, imagine-nous comme nous-mêmes nous n'osions pas le faire: dans nos instants les plus intimes, les plus secrets, dans les circonstances de la vie les plus extraordinairement ordinaires, en train d'écouter de la musique, de tomber amoureuses, de descendre une rue ombragée, ou de lire Lolita à Téhéran sous la révolution. Et imagine-nous ensuite quand tout cela nous fut enlevé, interdit, arraché.»
Lire Lolita à Téhéran a remporté le prix du Meilleur livre étranger 2004 et le Prix des lectrices de Elle, catégorie Document, en 2005.

mardi 23 juin 2009

CHAMPAGNE

Monique Proulx, roman, éditions Boréal, 391 pages
Une fois de plus, Monique Proulx nous éblouit grâce à la magie qui sort de sa plume. Comment fait-elle donc pour aussi bien saisir l'âme humaine dans toute sa diversité et sa complexité? Serait-elle un peu sorcière?
Champagne - comme tout ce qu'a écrit cette auteure que j'admire infiniment - se veut un hymne à la vie malgré toutes ses difficultés, un hommage à la nature et à la beauté qui nous rappelle un certain air: «Tout ce qui grince et siffle, tout ce qui pique l'attention ou la peau, tout ce qui promène au-dessus ou en dessous de l'eau sa livrée terne ou flamboyante en se contentant d'être ce qu'il est, dans cet état de parfaite aisance qui est de la beauté, tous ceux-là l'aideraient à réparer.»
Réparer? Enfin si cela est encore possible car il y a énormément à faire pour panser les plaies des écorchés vifs qui, la belle saison venue, prennent possession des petits chalets entourant le lac à l'Oie dans les Laurentides. Chacun des principaux personnages: Jérémie, Lila Szach, Simon, Claire et Violette nous dévoilera au fil des pages son drame intime, son ultime secret.
C'est beau, profond et triste, un peu comme l'automne, et on savourerait volontiers chacune des pages de Champagne un verre de bulles à la main, assis sur une bûche, les pieds sur un tapis de feuilles, en champagne, justement «... champagne et campagne, même combat. Mêmes bulles d'allégresse. Même mot, fondamentalement. Qui sait encore qu'au Moyen Âge tout ce qui n'était pas la ville, tout ce qui était territoire sauvage s'appelait la champagne?»
Bref, c'est à déguster et il ne faut surtout pas vous inquiéter si les mots de Monique Proulx vous montent à la tête, c'est tout à fait normal. L'auteure a remporté de nombreux prix, dont le Prix des libraires du Québec et le Prix Québec-Paris pour Homme invisible à la fenêtre (Boréal, 1993).

mardi 16 juin 2009

Des cadavres dans le placard

Dans la pièce «Le pont de la survivance», les comédiens du Théâtre des Deux Masques ont su rendre l'intensité et l'émotion propres au texte de l'auteure, Mme Catherine Chevrot.
L'amour rend aveugle, n'est-ce pas? C'est bien ce que pensaient Charlotte Todd (France Clavet) et son ami Florian Lizotte (Réjean Boulet)... que cette expression figure dans l'Almanach ou non.
Aveugle, il fallait l'être pour que Tharsile Todd (Nadine Mercier) ne puisse percer à jour l'être psychotique dont elle était amoureuse. Jean-Baptiste Corriveau (Jérôme Landry), a déjà derrière lui un lourd passé lorsqu'il s'établit à Montmagny avec femme et enfants. Il a été acquitté, faute de preuves, du viol et du meurtre de son employée Mlle Maçon (Julie Gagné) et des soupçons pèsent sur lui dans une nébuleuse affaire impliquant la disparition de l'un de ses commis.
Le voici donc à Saint-Thomas, violent, abusant de la dive bouteille et sans le sou, dépendant de sa belle-mère pour nourrir ses huit enfants. Les proches de Mme Todd sont inquiets, mais ce n'est pas Ignace (Gabriel Gaudreau) ou Sophie Saint-Pierre (Carole Gendron) qui pourraient prédire les intentions de Corriveau, à la veille de commettre un nouveau meurtre afin de toucher les quelques deniers amassés par belle-maman. Après être passé à l'acte, le fourbe personnage tente de coller son crime sur le dos d'Ignace mais nul n'est dupe. Pas même sa fille Norbelle (Stéphanie Cloutier-Gaudreau), qui essaie vainement de faire entendre raison à sa ô combien naïve maman.
Pour son crime, Jean-Baptiste Corriveau fut condamné à la pendaison avant de voir sa peine commuée en détention à perpétuité. Il est décédé derrière les barreaux 15 ans plus tard, soit en 1870, sa santé s'étant détériorée alors qu'il purgeait sa peine.
Puisqu'il s'agit d'un fait historique - un premier meurtre commis à Montmagny - l'auteure a dû faire preuve d'une grande rigueur et y investir de nombreuses heures de recherche. La qualité de son texte est bien servie par l'excellent jeu des acteurs, un éclairage et des décors soignés et enfin des costumes d'époque assortis.

mardi 9 juin 2009

Ces enfants... qui m'ont enseigné

Florence Guay, récits et mémoires d'école, les Éditions Floraison, Saint-Anselme, 381 pages
Avec un titre et un sujet pareils, on pense tout de suite à Gabrielle Roy et Ces enfants de ma vie, évidemment, et le livre de Florence Guay n'est effectivement pas très éloigné, dans la forme et le style, de celui de Mme Roy «... cette grande écrivaine que je vénère et qui m'inspire» de dire Mme Guay.
Celle qui toute jeune s'attelait avec angoisse à une lourde tâche a vite compris que l'enseignement serait pour elle une véritable vocation. Florence Guay y a consacré 35 ans de sa vie; trois décennies et demie empreintes de défis et d'aventures de toutes sortes qu'elle nous livre depuis ses débuts: «Je n'avais que seize ans et je ne m'imaginais pas seule dans une école de rang à assumer le poids d'une classe à sept divisions»... jusqu'à la toute fin d'une carrière bien remplie: «En classe, la réalisation d'un journal de fin d'année monopolisa les énergies de mes étudiants. (...) J'étais bien consciente qu'à travers eux, en ce dernier vécu de fin d'année scolaire, c'était à des centaines d'autres que je m'adressais, tous ces anciens élèves et étudiants que j'avais eu le bonheur de connaître dans ma vie d'enseignante.»
Beaucoup d'eau aura coulé sous les ponts entre ces deux périodes de sa vie et l'on prend grand plaisir à suivre les péripéties de la «maîtresse d'école» et celles de ses protégés - mille et une anecdotes teintées de rires, de larmes et d'une passion jamais démentie, celle de l'enseignement.
Après son départ, la jeune retraitée ne perdra pas de temps à se tourner les pouces. Plusieurs projets occuperont ses heures de liberté retrouvée, notamment des études en création littéraire à l'Université Laval, son implication au conseil d'administration de Radio-Bellechasse, la rédaction de chroniques et la fondation des Éditions Floraison. Enfin en 1998, Florence Guay publiait La petite histoire d'un rang.
Voici qu'elle récidive dix ans plus tard avec ce nouveau recueil, lancé en octobre dernier devant près de 400 personnes dont plusieurs anciens élèves. Ces enfants... qui m'ont enseigné est disponible chez Livres en tête à Montmagny et aux librairies Renaud-Bray de Lévis et Québec. Ce livre vivant, écrit avec des mots simples et touchants, recèle une part de notre histoire à tous et je vous le recommande sans hésitation.

mardi 2 juin 2009

Une bouteille à la mer

Comme l'illustre bien le dessin d'Isabelle imprimé sur le programme, la Troupe Hallélou lançait avec ce 44e spectacle annuel un message, ou plutôt une note, porteuse de paix et d'espoir.
C'est un fait, un thème se dégage de plusieurs pièces figurant à la programmation et Nicole Boulet se charge, avant le lever du rideau, de nous en tracer les grandes lignes. Il y est question de spiritualité, d'amour, d'élévation de l'âme. Elle réussit même à glisser dans sa composition l'élection de Barack Obama et un possible rapprochement des peuples, imaginez... On applaudit à cette initiative qui nous permet de mieux saisir les subtilités liées aux chansons présentées, que ce soit en français, en anglais ou en swahili.
Ont été chaleureusement accueillies: Trop loin l'Irlande, Ton histoire, You raise me up, Baba Yetu et Entre Matane et Baton rouge, entre autres, ainsi que la très belle Hallelujah de Leonard Cohen, chantée en rappel. Si l'on avait pu éviter les projecteurs aveuglants et se dispenser de quelques chorégraphies, on aurait encore mieux profité du chant choral. Je me dois de noter ici un commentaire entendu une fois de plus samedi soir, reflétant un sentiment apparemment partagé par plusieurs: pourquoi ne pas offrir aux solistes - certaines étant particulièrement appréciées du public magnymontois - des chansons qui leur permettraient d'exploiter leur plein potentiel?
Ceci étant dit, on accorde dans son ensemble une bonne note au spectacle, fruit d'un investissement personnel et d'un travail d'équipe considérables.

mardi 26 mai 2009

Elle avait les ailes d'un ange

Une Judi Richards resplendissante tout droit descendue du septième ciel afin de sauver l'humanité a vite fait de rendre ses ailes, la tâche s'avérant trop lourde pour ses frêles épaules. Qu'importe, elle aura contribué à rendre notre vie terrestre des plus agréables, ne serait-ce que quelques heures.
La tournée intitulée Au septième ciel recèle de nombreux atouts, à commencer par la principale intéressée dont le charme, la simplicité et l'énergie ne peuvent qu'attirer les louanges. Ensuite elle est bien entourée: cinq musiciens, deux choristes et bien sûr ses comparses de Toulouse, Liette et Laurie. Lorsque Judi marie sa voix à celle de la claviériste Monique Fauteux (la chanteuse du groupe Harmonium) sur un air composé par André Gagnon, on s'approche du septième ciel. Pour que la salle s'anime vraiment, il faudra cependant attendre cette joyeuse mise en scène autour d'un feu de camp réunissant tous les éléments indispensables: vestes à carreaux, bière, guimauves et enchaînement de chansons populaires.
Le début de la deuxième partie nous amène l'inégalable Yvon Deschamps qui pète sa coche en s'en prenant aux Chinois, responsables selon lui de tous les maux de la planète, en particulier de la montée du prix de l'essence. La démonstration de sa théorie - fruit d'une logique quelque peu tordue qui lui est propre - est déjà hilarante en soi mais ce n'est pas le plus beau. Les odeurs flottant dans l'air au moment de sa visite à Montmagny (combinaison de l'épandage et de la bouffe au homard qui a lieu le soir même dans la cafétéria de Casault) deviennent pour lui matière à une improvisation qui vous fait littéralement crouler de rire.
Après cette trop brève apparition, retour sur scène de Judi et Toulouse qui rendent hommage à leur ami George Thurston, alias Boule Noire, et offrent un pot-pourri de classiques que toute la salle s'empressera de chanter en chœur.
Finalement on aura eu un peu de tout dans ce spectacle: retour sur les années 70-80, dialogues, monologue d'humour, émotion... Judi Richards nous a même offert une interprétation LSQ de la dernière pièce. Quelle tristesse, tout de même, posséder autant de talent et être mariée à un phénomène qui affirme que la principale qualité de son épouse consiste à avoir une mère qui vit à Toronto!

mardi 19 mai 2009

Hélène Guilmette séduit les Alsaciens

De retour de Strasbourg où elle incarnait Sophie dans le chef-d'œuvre de Massenet - Werther, drame lyrique en quatre actes joué à l'Opéra du Rhin - Hélène Guilmette peut rentrer au pays la tête haute. C'est qu'elle fait beaucoup parler d'elle, «Notre soprano Hélène» comme nous l'écrit une fidèle admiratrice.
Jugez-en vous-même à la lecture des critiques dithyrambiques dont elle a fait l'objet, notamment celle de Pierre-Emnmanuel Lephay le lendemain de la première: «... Mais la vraie révélation de la soirée fut pour nous la Sophie de l'exceptionnelle Hélène Guilmette. Le timbre superbe et surtout, l'incarnation magistrale nous ont complètement enthousiasmé, et pourtant la chose n'était pas facile avec un rôle qui peut faire sourire. Hélène Guilmette sait en effet donner une profondeur extraordinaire à son personnage. Même intensité dans son apparition au troisième acte. En un mot, inoubliable. Chapeau Madame. Un nom à suivre.»
Et puis encore cette autre: «La soprano Hélène Guilmette, saluée par des bravos sonores et prolongés, a incarné avec une grande virtuosité la joie de vivre et la passion toute romantique de Sophie.»
Son talent, on le connaissait déjà; l'artiste, on l'aimait déjà, mais la voir ainsi briller de tous ses feux à l'étranger est toujours impressionnant, n'est-ce pas? Hélène n'étant pas du genre à s'asseoir sur ses lauriers, elle aura vite fait de reprendre le collier car son agenda est plutôt bien rempli pour le reste de l'année:
- Le Stabat Mater de Haydn avec les Violons du Roy, dirigés par Bernard Labadie, les 3 et 4 juin au Palais Montcalm;
- Concert prélude à la fête nationale le 20 juillet au Palais des Beaux Arts de Bruxelles, avec l'Orchestre national de Belgique;
- Le concert 25e anniversaire des Violons du Roy, aux côtés du contre-ténor Andréas Scholl, à Québec et Montréal les 14 et 16 octobre;
- La 4e symphonie de Malher avec l'OSM et Kent Nagano les 1er et 2 décembre à la Place des Arts;
- Le Messie de Haendel avec Jean-Marie Zeitouni et l'orchestre symphonique d'Edmonton les 4 et 5 décembre.
Des engagements ont déjà été pris, ici au pays aussi bien qu'outre-mer, pour 2010, 2011, 2012 et 2013. Contentons-nous de souligner pour l'instant un seul d'entre eux, celui qui lui tient particulièrement à cœur: un récital le 10 février 2010 au Palais Montcalm en compagnie de son ami de longue date, Martin Dubé, pianiste virtuose qui fait lui aussi valoir ses multiples talents à l'échelle internationale.

mardi 12 mai 2009

La grande classe!

Je m'attendais à un autre méga party jeudi soir, mais les gens dans la salle se sont montrés plutôt sages et ne se sont levés pour danser qu'en deuxième partie, aux premières notes de... Dégénérations, est-il besoin de le préciser?
Il y a à cela une raison toute simple: si chaque génération, justement, y avait ses représentants - de la p'tite pinotte à la respectable grand-maman - disons que la balance penchait légèrement du côté du cheveu grisonnant. Qu'à cela ne tienne, une fois debout les gens ont manifesté de façon plus expansive leur enthousiasme et ce jusqu'à la toute fin. Heureusement, car Mes Aïeux ont à mon avis offert un excellent spectacle.
On aime leur humour, leur style, la façon qu'ils ont de présenter chaque pièce, les harmonies superbes, les textes intelligents, bref tout ce qui compose leur «funklore». Ils s'inspirent aussi bien de personnages historiques tels La Corriveau, le Grand Antonio et Alexis le trotteur que de thèmes plus généraux comme la mondialisation, la politique, la famille. Le son et l'éclairage étaient impeccables et les musiciens fameux - accordons ici une mention spéciale à la violoniste et soulignons le fait que le saxophoniste remplaçait «le vrai» au pied levé. Chapeau, on ne s'en serait jamais douté à moins bien sûr de faire partie du paléopublic.
Ils ont bien fait leurs devoirs et ont su rassembler certains éléments propres à Montmagny avant d'entamer un chant d'amour dédié à la capitale de l'oie blanche. Bien sûr la plupart des artistes font de même afin de courtiser leur auditoire, mais dans leur cas c'était particulièrement réussi et surtout très drôle.
À chacun sa cause, le groupe «néo-trad» est membre d'Équiterre, ambassadeur de la Maison du développement durable et porteur d'eau, ou si vous préférez porte-parole de la Coalition Eau Secours! Bravo!
Autre jeune à garder à l'oeil
Avant l'entrée en scène de Mes Aïeux, on a eu droit à trois pièces de l'auteur-compositeur-interprète-guitariste-harmoniciste (ouf!) Alexandre Poulin. Le sympathique jeune homme propose des chansons à textes aux rythmes accrocheurs qui vous donnent envie de le mieux connaître. Ça tombe bien, il se produira au Parc de la mairie cet été. C'est à suivre.

mardi 5 mai 2009

Ode à Grosse-Île

Il n'y a pas grand chose à l'épreuve de Maurice Boulet quand il s'enflamme pour une cause. Après la course de fond, les massages, la prospection, l'ébénisterie, la poésie et tout ce que j'oublie, le voilà qui sort un CD: «Si Grosse-Île m'était chantée».
Maurice le dit d'emblée, il ne se prend pas pour Pavarotti et ne prétend nullement troquer ses présentes occupations contre une carrière de chanteur. Il a simplement voulu traduire en musique et en chanson les sentiments éprouvés alors qu'il lisait deux petits volumes consacrés à l'île de la quarantaine. Ses lectures l'ont tellement inspiré qu'en deux temps trois mouvements il composait ce qu'il considère être l'unique hymne dédié à Grosse-Île et à son épopée.
C'est ainsi que se retrouve sur CD la tragique destinée de milliers d'Irlandais fuyant la famine pour trouver la mort chemin faisant ou au bout de leur route. L'auteur, compositeur et guitariste interprète lui-même la chanson originale, alors que Marcelle Racine prête sa voix pour la narration en anglais sur la troisième piste. Entre les deux versions, on trouve une belle et mélancolique pièce à saveur irlandaise, «Entre deux rives», jouée au piano par Marie-Hélène Greffard. Ont également collaboré à l'enregistrement Clément Lacombe (guitare), François Dumas (violon), Gabriel Messervier (basse) et Daniel Lacombe (percussions).
Maurice Boulet n'a encore jamais mis les pieds à Grosse-Île, mais il compte bien remédier à la situation dès qu'il en aura l'occasion.

mardi 28 avril 2009

Blanche-Neige au 21e siècle

Ayant eu droit à une brève entrevue avec feu Walt Disney et les frères Grimm vendredi soir à la sortie du théâtre (j'ai mes contacts, vous savez) je suis en mesure de vous livrer leur commentaire: «Mais c'est nainporte quoi!».
De toute évidence, le célèbre cinéaste et les auteurs ne savaient pas à qui ils avaient affaire. Entre les mains de Germain Boulet et Noël Delisle, Blanche-Neige et les sept nains allait bien sûr se transformer en aventure rocambolesque, truffée d'anachronismes et calembours, passablement éloignée du conte de votre enfance. Qu'à cela ne tienne, cette première présentation a déclenché les rires et démontré une fois de plus le talent des comédiens du Théâtre des Deux Masques et du Club Richelieu.
M. Delisle l'avait bien dit: «Rien n'est plus difficile à composer qu'un personnage de la farce car il n'accepte pas de demi-mesures, de compromis et de jeux ternes et amorphes». On n'a effectivement que de bons commentaires à émettre sur la performance des comédiens. Il ne doit pas être aisé de danser, angoisser et trépigner pour ensuite garder la pose durant de longues minutes alors que l'action se déroule sur un autre plan. C'est joué avec adresse et expressivité. Si l'on ne se tord pas de rire pendant les deux heures que durera la pièce, je dois admettre que la ô combien dynamique interlocutrice chez Info Poison m'a bien fait rigoler. Ajoutons à cela les extraits musicaux qui se marient au texte et l'on peut conclure avoir passé un agréable moment avec Blanche-Neige et compagnie.
C'était soir de première, les comédiens ont encore du temps devant eux pour peaufiner leur jeu et si vous avez manqué les prestations de la fin de semaine dernière, vous avez les 2, 8, 9, 15 et 16 mai pour vous reprendre. La pièce est présentée à la salle François-Prévost du Centre des Migrations et vous pouvez obtenir vos billets en composant le 248-0450 ou le 248-8813.Rappelons en terminant que cette nouvelle initiative du Club Richelieu et du TDM a pour objectif la revitalisation des bibliothèques à Saint-Nicolas et Saint-Pie X.

mardi 21 avril 2009

Méchant party!

Fringants les Cowboys? Pas autant que leurs fans, gonflés à bloc, manifestant à grands cris leur enthousiasme avant même qu'ils ne se pointent sur scène.
Une ambiance pareille à la salle Edwin-Bélanger, je n'ai pas vu ça souvent. Dès la première note, les spectateurs se sont levés pour danser. Certains sont allés à l'avant, d'autres ont envahi les allées et, n'eut été l'absence des tables de pique-nique, on se serait cru au Festival de l'oie. De deux choses l'une: soit on se mettait au diapason, soit on s'éclipsait en douce.
Sérieux, ça swinguait fort et si l'on tient compte de l'exubérance manifestée dans la salle et sur scène, je crois bien qu'on a franchi le mur du son. Le fait que l'on ne comprenne pas la moitié des paroles ne semblait pas être un problème pour la majorité de l'auditoire, qui connaissait les chansons par cœur et chantait allègrement avec Karl Tremblay et ses acolytes. Au fond on ne peut que s'en réjouir, car il y a intérêt à écouter les messages véhiculés par ces jeunes artistes engagés. À preuve, cette réflexion de Jean-François Pauzé: C'est en revenant d'une conférence d'Hubert Reeves à Châteauguay qu'a commencé à germer l'idée de la chanson Plus rien. L'astrophysicien avait débuté sa présentation en disant quelque chose du genre «... dans l'histoire de la planète terre, il y a eu cinq extinctions majeures et elles ont toutes été la conséquence de phénomènes naturels (météorites, changements de température, etc.). La sixième pourrait bien être celle de l'être humain et ce sera la première fois qu'une espèce sera directement responsable de son extinction.»
Pour chaque billet vendu, 1$ servira à financer le nouveau projet de la Fondation Cowboys Fringants: la Tournée Verte. On vise à ce que cette dernière soit sans émission de CO2: «Les 8 000 tonnes de gaz carbonique émises par les 27 millions de kilomètres (?!) du groupe et du public venu assister aux spectacles seront captées par la plantation de près de 35 000 arbres».
Impliqués, conséquents, les pieds solidement ancrés sur cette terre qu'ils ont à cœur de sauvegarder, voilà l'essence des Cowboys Fringants mais pour bien le comprendre, mieux vaut les écouter dans son salon.

mardi 14 avril 2009

À la gloire du rock

Sylvain Cossette tape dans le mille avec son spectacle Keep on Rockin’. Il frappe fort dès le départ avec Carry on Wayward Son et, jusqu’à Bohemian Rhapsody chantée en rappel, lui et ses musiciens fantastiques, comme il le dit si bien, nous mèneront de surprise en surprise, toutes plus belles les unes que les autres.
Quelle décennie formidable, tout de même, que celle des années ’70, époque où l’on usait nos 45 tours – oui oui, j’en avais des tas – à casser les oreilles de nos parents avec tout ce qui se faisait alors de novateur et d’éclaté. Stevie, Elton, Pink Floyd, Styx, Supertramp… cumulaient alors les succès à un rythme effarant. Il n’y avait qu’à piger dans le lot et résultat des courses: deux compilations ayant reçu la certification platine (plus de 100 000 exemplaires vendus) et une tournée triomphale qui n’a pas fini d’attirer les nostalgiques du genre. Montmagny n’a pas fait exception à la règle. Une salle comble et comblée a vu défiler les Roxane, Hold the line, Band on the run, The Wall et autres Sweet Madam Blue, soutenues par une qualité d’interprétation et d’exécution exemplaire et de superbes jeux de lumière. Mes coups de cœur? School et Show me the way, où les musiciens se sont surpassés.
On ne se permet que de légères incartades au répertoire ciblé: Sylvain Cossette démontre une fois de plus l’étendue de son registre vocal avec Staying Alive et Andrée Watters, qui avait débuté le spectacle avec trois de ses chansons pendant que son chum se pomponnait dans sa loge, revient en fin de soirée interpréter Hit me with your best shot.

mardi 7 avril 2009

Dans les coulisses du TDM

Les gens du Théâtre des Deux Masques ne s'ennuient pas! La troupe récolte allègrement prix, honneurs et contrats. On est allé voir d'un peu plus près comment ils s'y prenaient pour si bien réussir. Un mot nous vient tout de suite à l'esprit: RIGUEUR.
En répétition mardi soir à la salle François-Prévost, membres du Club Richelieu et du TDM s'affairaient à mettre au point leur prochaine pièce: Blanche-Neige et les 7 nains, façon Germain Boulet. On nous promet beaucoup de plaisir avec cette parodie du célèbre conte de Disney. J'émets un léger doute, la farce étant un genre ne m'inspirant guère, mais comme on m'explique que c'est ce qu'il y a de plus difficile à jouer techniquement et physiquement parlant, j'observerai la chose sous un nouvel angle. Les fonds générés par ce spectacle, présenté les 24-25 avril et 2-8-9-15-16 mai, seront investis dans la revitalisation des bibliothèques à Saint-Nicolas et Saint-Pie X. Chapeau! me voilà déjà plus enthousiaste.
Pendant ce temps à Casault...
Alors que je m'entretenais avec Noël Delisle, grand manitou du TDM, son élève dirigeait trois piliers de la troupe dans une scène du Pont de la survivance. Ce drame d'une rare intensité, premier prix rappelons-le au 5e concours Création-Production-Théâtre de la FQTA, sera joué les 13 et 14 juin. Un petit saut de leur côté et l'on est en mesure d'effectuer un premier constat, flagrant: Gabriel Gaudreau met dans sa mise en scène et la direction de comédiens la même rigueur - à la limite du perfectionnisme - dont fait preuve le maître que l'on vient tout juste de voir à l'œuvre. Quant aux interprètes, on sait déjà qu'ils y mettront tout leur talent et leur passion, trac pas trac. Mais combien d'heures ils auront investies avant de jouer devant public! Pas d'erreur, faut avoir le théâtre tatoué sur le cœur.
Une relève bienvenue
M. Delisle me confiait qu'il était très heureux de partager la tâche avec Gabriel. Le seul fait qu'il le laisse diriger la pièce de Catherine Chevrot est déjà une grande preuve de confiance. Et puis il y a Marc Fréchette, déjà en charge des contes et légendes et de l'animation lors de certaines activités, qui commence à tâter de la mise en scène. Noël Delisle (personnalité Richelieu 2009) en a tellement plein les bras qu'il a dû mettre de côté pour l'instant La Cantatrice chauve de Ionesco.
Le tour des îles
Fin août, le TDM et la troupe Nouvelle Époque seront à Grosse Île. Monologues, danse et contes inédits liés à l'île de la quarantaine et à l'archipel de l'Isle-aux-Grues figurent au programme.
Seule troupe québécoise sélectionnée
Quelque 25 membres du TDM prendront la route en septembre pour le Festival international de théâtre de Mont-Laurier. Ils y joueront la pièce 10e anniversaire «Nous sommes tous des clowns». Fallait être drôlement solide pour se qualifier à l'événement Double Défi qui réunira 27 troupes en provenance de 24 pays.
Si l'agriculture m'était contée
Enfin, pour clore en beauté cette année 2009 pour le moins chargée, le Théâtre des Deux Masques offrira en octobre et novembre un spectacle original visant à souligner le 150e anniversaire de la Société d'agriculture du comté de Montmagny.

mardi 31 mars 2009

Incursion dans les tréfonds du subconscient

«Le subconscient ne questionne pas, il obéit à la suggestion». Bienvenue dans l'univers fascinant d'un maître de l'hypnose qui, durant près de trois heures, s'emploiera à démontrer que l'esprit l'emporte sur la matière.
Transfert d'énergie, magnétisme, hypnose... Les techniques utilisées par Messmer demeurent énigmatiques, tout comme le personnage. Le peu que l'on sait est qu'il a commencé tout jeune à les mettre en pratique (les résultats obtenus font d'ailleurs foi d'une longue expérience). On présume en outre que son nom de scène provient du terme anglais «mesmerized», qui signifie fasciné.
C'est un fait, il fascine... et vous fait rire. On ne se moque pas des volontaires qui ont l'audace ou la curiosité de se prêter à son jeu, mais ce qu'il réussit à tirer de ses somnambules ne peut que déclencher l'hilarité. S'il les fait marcher en apesanteur, régresser dans le temps, parler martien ou japonais, gardons à l'esprit que les personnes qui sont montées sur scène lui ont accordé le pouvoir d'agir sur leur subconscient. Sinon, c'est l'angoisse.
Il lui suffit dans certains cas - ça ne fonctionne pas avec tout le monde - d'un simple contact, un regard, une parole et vous voilà un pantin qu'il contrôle à sa guise. Son attitude n'a cependant rien d'offensant. Lorsque le charme n'opère plus, Messmer ou son partenaire Sincler se contente de remercier la personne et de revenir à celles qui sont toujours envoûtées. Certains dans la salle - particulièrement réceptifs à son énergie - ont momentanément perdu le contrôle de leurs facultés motrices ou se sont mis en mode veille. S'il est vrai que quelques minutes d'hypnose valent trois heures d'un sommeil réparateur, alors on se réjouit pour eux. Après tout, ceux qui ont harponné des requins, se sont délectés d'une bonne pinte de sang en Transylvanie ou se sont payé une mémorable chevauchée à l'époque des Patriotes méritent bien un peu de repos. Quant à Franck Einstein, espérons qu'il a recouvré sa pleine identité...

mardi 24 mars 2009

De 80 à 107 ans trente-sept aînés remarquables

La voie semblait toute tracée pour ce professeur de littérature à la retraite pratiquant depuis près de 40 ans la course de fond: publier un ouvrage dont les héros seraient des gens ayant suivi un parcours de longue haleine.
M. Serge Richard, qui a enseigné le théâtre et la littérature à François-Xavier Garneau, est passé au journal jeudi dernier. Après un entretien avec ce gaillard sympathique, j'avais entre les mains le livre qu'il publiait à compte d'auteur en janvier dernier. Essentiellement, il y fait ce constat: «Les sociétés occidentales, en boudant les connaissances de leurs aînés, pratiquent l'art vain de s'appauvrir.»
Parmi les gens qu'il a rencontrés, trois sont des personnalités connues: Jacques Amyot, premier à effectuer à la nage la traversée du Lac-Saint-Jean; Paul Hébert, brillant comédien surnommé le «Rêveur acharné»; Phil Latulippe, dont M. Richard a fait paraître en 1991 une première biographie (Le vieil homme et la route).
Si les 34 autres octogénaires, nonagénaires ou centenaires qui font l'objet de ce livre n'ont pas connu la renommée, ils n'en sont pas moins dignes de mention. On y retrouve une Magnymontoise, Mme Jacqueline Martel, qui à 17 ans était engagée en tant que pianiste en direct à la station de radio de Sainte-Anne-de-la-Pocatière. Mme Martel utilise encore deux fois par jour son piano. Selon elle, en plus de contrer l'arthrite dans ses doigts, l'instrument est la meilleure police d'assurance pour «loger son moral dans les hautes sphères».
M. Gérard Lachance, dernier garde-feu du Mont Sugar Loaf à Sainte-Lucie-de-Beauregard, a toujours été attiré par la poésie, la nature, les voyages. L'un des plus anciens et fidèles lecteurs du quotidien Le Soleil a cumulé au fil des ans de pleines boîtes de notes et d'écrits que sa fille Alice a triés afin de publier «À l'ombre du Sugar Loaf», réédité en 2006.
Outre la rédaction de ce livre qui lui aura pris cinq ans, l'auteur ne s'est pas tourné les pouces depuis sa retraite en 2006. Ce passionné de voyages, d'ornithologie, de photographie, de course à pied et de randonnées en montagne présente des conférences un peu partout en province. Il sera d'ailleurs présent à la fin mai au Salon des générations à Québec. Enfin il ajoutait en 2008 une nouvelle corde à son arc: arborant un nez de clown car il est membre de l'organisme Docteur Fou Rire, notre Patch Adams québécois alias Colibri se fait fort d'apporter un peu de rire et d'émerveillement aux aînés qui n'ont pas tous la chance de vivre un âge d'or digne de ce nom.
On peut joindre Serge Richard afin de se procurer le livre qu'il distribue lui-même (coût 25$) ou à titre de conférencier en composant le 418-877-6236 ou en écrivant à l'adresse courriel: srichedoiseaux@videotron.ca

mardi 17 mars 2009

Guides des temps modernes

L'heure est à la quête spirituelle. Comment s'en étonner, nous qui vivons dans un monde passablement perturbé? Je vous propose dans la présente chronique deux romans dits initiatiques, le premier faisant présentement fureur un peu partout sur la planète (cinq millions d'exemplaires vendus!) et le deuxième étant considéré comme le roman phare d'un auteur à succès qui sera de passage à Montmagny dans quelques jours.
LE SHACK
Quand la tragédie a rendez-vous avec l'éternité
W. Paul Young, éditions Le jour, 331 pages
Un dégénéré s'en prend à Missy, petite fille de six ans. Quatre années plus tard, alors que le père de l'enfant n'a toujours pas fait son deuil et qu'il en veut à la planète entière et à Dieu en particulier, un billet laconique l'incite à retourner sur les lieux du crime. Il y rencontrera une insolite Trinité qui s'emploiera à ramener la brebis perdue dans le droit chemin en lui expliquant le pourquoi du comment des horreurs planétaires: «Notre terre est pareille à une enfant qui a grandi orpheline, sans personne pour la guider ou la diriger. Des gens ont voulu l'aider, mais la plupart se sont simplement servis d'elle. Alors ils usent et abusent de la terre avec insouciance et quand elle tremble ou souffle, ils s'en offusquent et montrent le poing à Dieu.»
La fin de semaine que passera au Shack notre quinquagénaire endeuillé bouleversera à jamais ses convictions profondes, sa façon de voir les choses et d'interagir avec ses semblables. Son histoire aurait eu un impact similaire sur un nombre impressionnant de lecteurs.
LE GUERRIER PACIFIQUE
Dan Millman, éditions J'ai lu, 248 pages
Sportif accompli, Dan a beau cumuler les succès, il demeure insatisfait. Sa rencontre avec un vieil excentrique qu'il appellera Socrate marquera le début d'un long et pénible cheminement vers l'éveil et «l'illumination», soit la découverte de la vérité qui se cache derrière l'infime partie de ce que l'on perçoit lors de notre passage ici-bas.
Psychologie humaniste, philosophie orientale, expériences personnelles; Dan Millman puise à toutes les sources afin d'illustrer son propos. «La mort n'est pas triste; ce qui est triste, c'est que les gens ne vivent pas vraiment.»
Ces deux livres partagent plusieurs points communs:
Primo, on ne peut qu'applaudir aux valeurs prônées par leurs auteurs (respect, tolérance, dépassement de soi...).
Secundo, les invitations à la connaissance se font par le biais de mots déposés dans la boîte aux lettres (il faut toujours être gentil avec son facteur, on ne sait jamais).
Tertio, examinons la façon dont l'enseignement est véhiculé: un sage à la science infuse s'exprime en paraboles, un initié ingénu s'acharne à ne pas poser les bonnes questions et le tout s'adresse à un lectorat qui a grand besoin de réponses. Si ces dernières s'avèrent décevantes ou prévisibles, dites-vous qu'il n'y a aucun mal à revoir des notions déjà connues, souvent négligées, toujours essentielles.
Soulignons en terminant que Le guerrier pacifique a été écrit plusieurs années avant Le Shack.
Dan Millman sera à la librairie Livres en tête ce vendredi entre 17 h et 18 h et se fera un plaisir d'y signer des autographes.

mardi 10 mars 2009

Calibre supérieur

Trois virtuoses nous ont offert une brillante démonstration de leur savoir-faire.
Il n'est pas aisé de trouver les mots justes pour décrire ce concert en trio intitulé «Autour de Beethoven». Disons d'abord qu'on n'a pas perdu de temps avec les fioritures et l'emballage. Pour la présentation des pièces, il fallait s'en remettre au programme qu'on tenait entre les mains. Les musiciens ne se sont pas adressés au public et le rappel demandé n'est pas venu. Enfin on a eu droit à un répertoire peu connu du commun des mortels. Alors?
Alors les musiciens sont simplement allés à l'essentiel, réservant toutes leurs énergies pour la qualité d'exécution du Trio No 4, op. 11 et du Trio No 5 «Les esprits» op. 70 de Beethoven, entre lesquels étaient insérés le Trio en sol de Debussy et des pièces au violon de Kreisler. La passion et l'intensité qu'ont mis dans leur jeu les trois prodiges a fait en sorte qu'abandonnant toute velléité d'analyse, on se soit laissé emporter par la beauté de la musique et les images qu'elle faisait naître. Il suffisait en somme d'observer leur écoute mutuelle et l'harmonie qui s'en dégageait pour être conquis. Et puis ils ont bien voulu nous donner un petit coup de pouce, signalant au passage (sourire en coin, archets en l'air) qu'il était temps de manifester notre appréciation.
Boursier de la Manhattan School of Music, le pianiste Martin Dubé retourne régulièrement à New York, où il a vécu cinq ans, afin de parfaire ses connaissances vocales et ses talents de coach lyrique.
Professeur adjoint de violon et directeur du département des cordes à l'Université McGill, Jonathan Crow enregistrait à l'automne 2008 son premier album solo: Sonates pour violon et piano.
Originaire de Chicoutimi, le violoncelliste Sylvain Murray est membre de l'Orchestre symphonique de Montréal et, tout comme Martin, codirecteur artistique à la Société de musique de chambre de Québec.

mardi 3 mars 2009

Autour de Beethoven

«J'ai appelé ce concert Autour de Beethoven car ce dernier tient une place toute spéciale dans ma vie. J'ai choisi deux oeuvres vraiment différentes, la première assez frivole avec des thèmes et variations où l'on voit un Beethoven rieur et assez léger et la 2e est le trio des esprits, où la noirceur et la profondeur du maître se font entendre très clairement. Figurent également au programme le Trio de Debussy, très proche encore de l'époque romantique - un délice à l'oreille - et les pièces de genre au violon de Kreisler, où M. Crow saura charmer toutes les dames du public!» Voilà qui augure bien...
On lui sait gré de venir jouer dans son patelin lorsque l'occasion s'y prête, les diverses facettes de la carrière de Martin Dubé ne lui laissant guère le temps de souffler: «Je suis très occupé ici avec les chanteurs d'opéra, travaillant à l'Université de Montréal, à l'Atelier lyrique de l'Opéra de Montréal et en privé, accueillant bon nombre de professionnels dans la préparation de leurs rôles. Je suis codirecteur artistique de la Société de musique de chambre de Québec, qui se produit quatre fois par année au Musée de l'Amérique française. Je donne environ 30 concerts annuellement dans différents festivals et autres événements et depuis 13 ans je passe les étés à la Chautauqua Institution, festival d'opéra près de Buffalo.» Enfin Martin revient tout juste de Syrie, où il est allé faire du «coaching vocal» et guider les profs de chant dans la formation de leurs élèves à l'Institut de musique de Damas.
Cette carrière brillante et prolifique, Martin Dubé la doit en partie à deux dames qu'il s'empresse de nommer: «J'ai eu la plus grande chance au monde. J'ai eu deux professeurs ici à Montmagny (Mme Paule Blanchet, professeure fantastique de piano, et Mme Claudette Fortin, prof au secondaire et mentor tout le long de mes études secondaires) qui m'ont donné le goût de la musique, la confiance et la technique pour me lancer dans des études plus sérieuses et être admis par la suite dans toutes les écoles où je faisais application. J'ai fait, en plus du piano, des études en trompette et j'ai eu mes heures de plaisir à la flûte et au cor français.»
Celui qui se décrit de façon un peu paradoxale: travaillant, extrêmement exigeant (il faut le demander à ses élèves!), trop perfectionniste, rieur et aimant la vie, termine cette entrevue en invitant les gens à venir ce samedi 7 mars les entendre, lui et ses talentueux collègues: «Je crois que ce sera une soirée très agréable sur la scène et dans la salle.»
Il reste encore quelques bons billets aux Arts de la scène: 418-241-5799 ou www.adls.ca.

mardi 17 février 2009

Une femme à Berlin

Journal 20 avril - 22 juin 1945, auteure anonyme, folio, 394 pages
L'après-guerre peut être aussi sinon plus pénible que le conflit lui-même - tout dépend bien sûr du point de vue. Chose certaine, ce que raconte une femme d'une trentaine d'années se terrant après la chute de Berlin dans une cité envahie par l'armée russe a de quoi vous faire remettre en perspective la gravité de vos malheurs.
Le ton employé (neutralité, absence d'émotion, humour même) est peut-être ce qu'il y a de plus saisissant dans ce récit d'un calvaire qui aura duré deux mois. Doit-on parler de sang froid ou plutôt, comme elle le laisse entendre, d'un engourdissement des sens? Bien qu'elle ait enduré la faim, le froid, les travaux forcés et, surtout, les viols à répétition, l'auteure ne cède ni à la panique ni à l'apitoiement. Elle choisit plutôt de faire face avec les moyens à sa portée, soit:
- Relativiser: «La somme des larmes est constante. Quelles que soient les formules ou les bannières auxquelles les peuples se rallient, quels que soient les dieux auxquels ils croient ou leur pouvoir d'achat: la somme des larmes, des souffrances et des angoisses est le prix que doit payer tout un chacun pour son existence, et elle reste constante. Les populations gâtées se vautrent dans la névrose et la satiété. Ceux auxquels le sort a infligé un excès de souffrances, comme nous aujourd'hui, ne peuvent s'en sortir qu'en se blindant.»
- Tenter de reprendre foi en l'humanité: «J'ai lu du Rilke, du Goethe, du Hauptmann. C'est consolant de savoir qu'eux aussi sont des nôtres et de notre espèce.»
- Affronter sa propre culpabilité: «Aucune victime n'a le droit de porter sa souffrance comme une couronne d'épines. Moi, en tout cas, j'avais le sentiment que ce qui m'arrivait là réglait un compte.»
Ces dernières phrases auraient été adressées en 1947 à Kurt W. Marek, journaliste et critique Berlinois qui réussit à faire paraître le livre chez un éditeur américain en 1954. La nouvelle édition, parue plusieurs décennies après la version originale, ne pouvait voir le jour qu'après le décès de l'auteure, selon sa volonté. La dame fut d'ailleurs inflexible sur ce dernier point et l'on comprend pourquoi.
Il s'agit ici d'un témoignage historique, authentique et troublant ramenant pour une énième fois ces mille questions sans réponse liées à la guerre et à la cruauté de l'homme.

dimanche 15 février 2009

Elle fera vibrer les églises

Une soprano à la voix magnifique s`apprête à lancer de nouvelles notes sur le paysage culturel sud-côtois.
Entamant une tournée devant la conduire dans une trentaine d`églises de la région, Mme Shirley Russell de Saint-Roch-des-Aulnaies présentera un concert d`environ une heure composé de chants classiques, religieux, spirituels et populaires. Après avoir entendu les démos qu`elle m`a fait parvenir je suis en mesure d`affirmer, amis mélomanes, que vous ne regretterez pas votre soirée.
Cette ancienne élève de Mme Nicole Biron, professeure de chant classique de Saint-Jean-Port-Joli, s`était produite en 2002 en compagnie de quatre musiciens à la salle Gérard-Ouellet. Ils avaient alors pratiquement fait salle comble. Cette fois elle sera accompagnée de Mme Nathalie Gagnon, organiste professionnelle de Lévis. Figurent au programme des pièces de Bach, Franck, Caccini et McKennitt. La tournée débutera à l`église de Saint-Jean-Port-Joli le samedi 21 février à 20h30, se poursuivra le 28 à la cathédrale de La Pocatière et l`on est à négocier des prestations à Montmagny, Charny, Vanier... Les billets, au coût de 10$, seront en vente sur place.
Originaire de Nouvelle-Écosse, Mme Russell habite au Québec depuis une trentaine d`années. Elle nous promet pour l`été qui vient un premier album où l`on retrouvera différents styles musicaux, preuve de sa versatilité.

Ah, la boulette!

On a beau dire, on a beau faire, un con demeure un con même lorsqu`il est sur le point de faire amende honorable.
Vous connaissez le dîner de cons? Il s`agit d`un divertissement hebdomadaire où chaque participant doit inviter un pauvre diable qui saura surclasser tous ses semblables. Pierre Brochant croit avoir trouvé son homme en la personne de François Pignon. Un con de classe mondiale, clame-t-il, tout fier d`avoir déniché la perle rare qui, pétrie de bonnes intentions, réussira en quelques heures à bousiller tout son univers.
Les comédiens Nicolas Létourneau, Emmanuel Bédard, Marie-Hélène Lalande, Martin Boily et Vincent Champoux recréent sur scène cette comédie hilarante. Si certaines de leurs répliques nous échappent - il faut parfois tendre l`oreille - on se doit de souligner le jeu exemplaire de Nicolas Létourneau qui a su redonner vie au personnage du regretté Jacques Villeret.
Créée en 2007 à Québec par le Théâtre Voix d`Accès, la production québécoise Le dîner de cons a été mise en scène par Renaud Paradis. Si l`on s`est permis quelques libertés en ce qui a trait aux effets techniques, sonores ou à la gestuelle, la pièce ne s`éloigne guère du film qui a connu un succès international.

En terrain connu

Musicienne pigiste dans la grande région de Montréal, Catherine Maurais sera sur scène aux côtés d`IMA demain soir.
Si IMA nous avait bien dit qu`elle serait accompagnée d`une musicienne aux talents multiples, elle avait négligé de préciser qu`il s`agissait de Catherine Maurais!
Celle qu`on a déjà eu l`occasion d`apprécier sur scène dans sa ville natale, accompagnant notamment le Trio François Bourassa et Dan Bigras, sera présente demain aux côtés d`IMA (y aurait-il un critère phonétique permettant de s`assurer ses précieux services?). Mais non, bien sûr, car elle a également travaillé avec Denise Filiatrault, Florence K., Ginette Reno et Diane Dufresne, rien de moins!
Pianiste, accordéoniste, accompagnatrice, chanteuse et auteure-compositeure, Catherine ne cesse de se démarquer depuis la fin de ses études en jazz à l`Université de Montréal. Enseignante au Cégep de Joliette et répétitrice pour l`ensemble vocal Les Enchanteurs, l`énergique jeune femme travaille présentement sur un album à saveur jazz, son domaine de prédilection. On l`accueillera avec joie.

Entrevue avec IMA

IMA, celle dont la voix a été qualifiée à la fois de torride et fraîche, voluptueuse et candide, se produira à la salle Edwin-Bélanger le jeudi 29 janvier. Voilà de singulières combinaisons qui piquent la curiosité.
IMA a vu le jour à Ville Lasalle en 1978. Cumulant cours de chant, de théâtre et de danse, elle remporte en 2001 le Premier prix d`interprétation et la Mention du public lors du concours «Ma première Place des Arts». Séduit par sa voix, Dominique Messier lui propose d`enregistrer le titre «In Your Eyes (I See My Life)» pour l`album «A Tribute to Ayrton Senna», auquel contribuent de mégastars tels Phil Collins et Tina Turner. Ce n`est pas rien!
La tournée Smile fait suite à la sortie en mars 2006 de l`album du même nom, son troisième, vendu à plus de 100 000 exemplaires. «C`est un merveilleux cadeau du ciel!», s`exclamera la principale intéressée. Y figurent des pièces telles What a wonderful world, Laisse-moi t`aimer, Que Sera Sera, bref un mélange de genres et d`époques qui peut surprendre à prime abord. «Le choix des chansons s`est fait en équipe avec mon manager Alessandro et mon réalisateur Guy St-Onge; j`avais envie de chanter des chansons d`amour, romantiques... Et Guy et moi avions la même intention de départ avec cet album: faire du bien, mettre un baume sur le coeur des gens...» Certaines pièces portent sa signature et elle envisage d`enregistrer un jour un disque dont elle aura écrit toutes les chansons. Entre-temps, paraîtra à la mi-mars «A la vida», album rempli selon ses dires de soleil, de «rythmes chauds de partout à travers le monde pour oublier les soucis et prendre le temps de sourire à la vie et danser!!!».
Sur scène, elle est bien entourée: guitariste, bassiste, batteur, percussionniste et une guitariste-accordéoniste-pianiste. «Une belle équipe et de super musiciens» écrit-elle à grands renforts de points d`exclamation.
Celle qui débutait sa carrière en 2000 se décrit comme étant une personne intense, épicurienne, curieuse et passionnée. Elle considère avec philosophie les moments plus difficiles: «Je crois sincèrement que tout ce qui nous arrive c`est toujours pour nous rendre plus forts! Je mets tout mon amour dans chaque instant et j`ai envie de créer du bonheur, donc je persévère et je souris à la vie et elle me le rend bien!!!». Confiante et sympathique, vous en conviendrez. Bienvenue dans son propre wonderful world.

Coup de cœur

Exit la couleur rose bonbon qui colle un peu trop à l`image de Lynda Lemay. Avec «Allô c`est moi», l`auteure-compositrice-interprète nous dévoile une nouvelle facette et attention, Madame ne mâche pas ses mots.
Le dernier disque de Lynda Lemay s`est avéré pour moi un coup de cœur. Si j`avais beaucoup aimé la chanson «Bleu» entendue l`été dernier sur les plaines, je ne m`attendais pas à apprécier autant le reste de l`album.
Celle qui nous a habitués au son de sa guitare acoustique fait ici appel au banjo, à la clarinette, au violon et aux chœurs, histoire d`habiller ses textes de styles et arrangements musicaux plus étoffés. Quant à sa plume, elle l`a tellement aiguisée qu`elle menace maintenant de sa pointe acérée ceux qui l`ont un peu trop fait suer: «... Je suis sortie ainsi armée, nos deux bouteilles de vin dans l`corps / Je les ai bues à ta santé, maintenant, j`les digère à ta mort...» (La Partouze) «... Je suis là que j`l`accueille / Ce sale prédateur / J`m`assure d`l`avoir à l`œil / Chaque seconde de chaque heure...» (Des comme lui).
Rassurez-vous, Lynda Lemay n`est pas passée d`un extrême à l`autre - du rose au noir - elle s`est également attardée sur le bleu, au grand bonheur de tout nationaliste qui se respecte. Ce CD nuancé fait aussi place à l`humour, à la poésie, au quotidien. Quand sa fille Jessie interprète la 7e piste, Rends-moi ma bicyclette, on reconnaît aisément les intonations maternelles.
Plusieurs mélodies sont accrocheuses, on pense entre autres à La grande classe, et une écoute attentive vous révélera maintes perles linguistiques, de malicieux clins d`oeils et quelques chutes assassines.